L'ECRIT DE JOIE

L'ECRIT DE JOIE

Anne-Marie sait faire des trous

                                         Anne-Marie s'essaye aux trous

 

        Je mange de bon appétit ce mercredi. Je n’ai pas cessé de penser à notre randonnée de cet après-midi. Ce qui m’a même rendu légèrement fébrile lors de ma fin de matinée. J’ai peins dans une sorte d’exaltation créative. Dès la vaisselle terminée, je monte me brosser les dents, me changer. La température extérieure est de 14°. Le ciel est voilé, laiteux, mais lumineux. Je porte mon pantalon multi poches kaki. Un épais maillot de coton brun sous mon épaisse chemise canadienne à carreaux. Mes chaussures de marche. Impatient d’aller préparer le contenu du petit sac à dos, je dévale les escaliers. J’ai dressé une liste l’année dernière. Au début de la réalisation des créations murales. Elle reste très utile. Ma minuscule perceuse dont j’ai mis la batterie en charge dès le levé. Un jeu de trois mèches à forer. La mèche "cloche" qui permet de finaliser l’ouverture circulaire avec très exactement cinq centimètres de diamètre. Du papier à poncer. Un tube de peinture acrylique "terre de Sienne". Elle permet les raccords et surtout les maquillages.

 

        Le pinceau. Un minuscule flacon emplit d’eau. Deux mandarines, les barres de céréales et la gourde isotherme de thé bouillant. Le K-ways doublé. Me voilà paré. Il va être treize heures vingt cinq. Anne-Marie est ponctuelle. Mon sac sur le dos, je monte jusqu’au portail. À peine l’ai-je refermé qu’arrive la Clio rouge bronze. Le magnifique sourire de sa conductrice. J’entre dans la voiture. Trois bises. << Je me réjouis depuis ce matin. J’ai fait toutes mes préparations pour demain. Je suis sereine ! >> lance Anne-Marie en accélérant. J’avoue partager le même ressenti. Je précise : << Et pour ce soir, j’ai réservé une table au "Bol d’Or" à partir de dix neuf heures ! >>. Tout en conduisant, Anne-Marie pose sa main droite sur ma cuisse en disant : << Tu t’es bien remis de ton après-midi avec la gamine ? >>. Elle fait allusion à Virginie. Je rajoute : << Elle a quand même dix neuf ans tu sais ! >>. Ma conductrice conclue : << Tu devrais avoir honte ! >>. Je réponds : << Je vais me lancer en politique comme ça ce sera légitime avec les "petites" ! >>. Nous traversons le bourg pour garer la voiture sur le parking de la salle polyvalente.

 

        Anne-Marie change de chaussures. Elle porte un pantalon et une parka kakis. Nous mettons nos sacs sur le dos. Il y a cinq cent mètres jusqu’aux bâtiments du chenil. Les aboiements son insupportables. Nous contournons les constructions pour prendre en direction de la forêt. Anne-Marie me raconte sa semaine. Me donne des nouvelles de Nathalie qui occupe son temps libre auprès de ses parents malades. << Elle me charge de te passer le bonjour et de t’embrasser. Je ne sais pas de quelle manière, aussi je le fais comme ça ! >> dit Anne-Marie en stoppant net, sur la pointe des pieds, pour poser ses lèvres sur les miennes. Je la prends par la taille pour la serrer contre moi. Nous nous embrassons en gloussant. Je fais : << Tu remercieras Nathalie comme ça ! >>. Nous rions de bon cœur en arrivant à la rivière torrentueuse. Il reste un peu plus d’une heure trente jusqu’au vieux moulin. L’ambiance est particulière en ce début novembre. Magique. Les arbres sont nus. Un épais tapis de feuilles recouvre le sol. Ce qui rend nos pas sonores en les foulant.

 

        Je randonne rarement sur cet itinéraire. Il est sur terrain plat et ne demande pas vraiment d’effort. J’ai une préférence pour les chemins accidentés et pour les dénivelés. Anne-Marie marche à l’avant. Elle s’arrête pour lire les balises indicatrices. Caresse le tronc de l’arbre. Le prenant quelquefois dans ses bras en précisant : << C’est régénérateur ! >>. Nous ne nous éloignons pas trop de la rivière. Son bruit régulier induit un sentiment de sécurité. Voilà le premier abri. Ce sont quatre piliers de bois massif qui supportent un toit de tuiles moussues. Juste une cloison sur laquelle est fixée une carte de la région. C’est là, juste en dessous, que je pose mon index en disant : << Le point "G" ! >>. Nous retirons nos sacs pour les poser sur la table. Il y a deux bancs. Anne-Marie s’y assoit. Elle me regarde déballer mon matériel. << Tu es sacrément bien équipé dis-donc ! >> fait elle, plutôt stupéfaite. Je place méthodiquement chaque objet en espérant qu’aucun promeneur ne viendra perturber ma création.

 

        Je contourne la table pour venir faire une bise à mon amie. Je fixe la mèche de 5 mm sur la perceuse. J’appuie sur l’interrupteur. Fonctionnement parfait. Le doux ronronnement du moteur électrique. Je m’approche de la cloison. Anne-Marie se lève pour venir me rejoindre. Accroupie à côté de moi. Je demande : << Tu veux percer ? >>. Ravie de ma proposition elle s’empare de la Black & Decker. Elle vise. Tiens la mèche parfaitement droite et perpendiculaire à la planche horizontale. Je précise : << J’ai une préférence pour les planches verticales. Les trous vieillissent mieux ! >>. Mon amie perce. Sans forcer. Avec une délicatesse toute féminine. Je dis : << C’est beau une perceuse dans les mains d’une femme ! >>. Une bise sur sa joue. Nullement perturbée, ma bricoleuse maintient l’outil parfaitement droit. << J’ai percé plein de fois dans mon appartement ! >> fait elle, concentrée. La mèche disparaît soudainement. << Ça y est ! >> s’écrie ma créatrice murale. Je me redresse pour faire le tour de l’abri. Personne.

 

        Je reviens alors qu’Anne-Marie fixe déjà la mèche de 10 mm. C’est qu’elle s’y connaît. Je la regarde et c’est formidable. Je tire mon I-phone de sa pochette en disant : << Je vais filmer ta création. On appellera ce trou de tes initiales : Le trou "A M" ! >>. La mèche bien fixée, en disant : << Bonne idée le trou "A M" ! >>, elle s’accroupit devant la cloison. Elle introduit l’extrémité de la mèche. Elle perce, agrandissant l’ouverture. Il vole des copeaux de bois. Je filme consciencieusement sous tous les angles. Ça y est, cette mèche aussi disparaît soudain complètement. << Regarde-moi ça, si ce n’est pas beau ! >> lance fièrement mon amie. Elle y colle son œil. Je retourne vérifier. Personne. Anne-Marie fixe à présent la grosse mèche de 20 mm. << Là, c’est du lourd, ça ne plaisante plus ! >> dit elle en perçant. Je filme. C’est extraordinaire de la voir concentrée ainsi. << Du bon boulot ! >> s’exclame t-elle quand cette mèche s’enfonce complètement. Le mandrin venant heurter le bois avec un bruit sourd.

Anne-Marie y met le doigt. Il ne reste plus qu’à fixer la mèche "cloche" du diamètre approprié.

 

        Accroupie, concentrée, retenant sa respiration, visant le plus justement possible, elle perce. Ça y est. Le cercle de bois, parfaitement rond, du diamètre de cinq centimètres est dans la cloche. Il suffit de secouer pour qu’il tombe. Ma bricoleuse le ramasse, regarde l’objectif, montrant l’objet en disant : << Souvenir ! >>. Elle se redresse, démonte la mèche, pose la perceuse pour s’emparer d’un des trois papiers à poncer. D’abord celui à grains forts. Je suis enchanté. Je n’ai qu’à filmer. Ma bricoleuse ponce avec une habileté et une adresse qui suscite l’admiration. En passant son doigt à plusieurs reprises. Contrôlant ainsi qu’il ne subsiste aucune écharde. Elle reprend avec le grain moyen, avant de fignoler au grain fin. << Et voilà ! Du bel ouvrage ! >> s’exclame t-elle. Je la félicite. Il n’y a plus qu’à passer un peu de peinture sur l’épaisseur intérieure afin de préserver la discrétion. << Je fais ! >> lance Anne-Marie.

 

        Je totalise sept minutes de film. << On se le regardera ensemble samedi soir, ça te dit ? >> propose ma créatrice murale. La peinture acrylique sèche en quelques minutes. Surtout à l’air libre. C’est une réalisation de tout premier ordre. Magnifique. Professionnelle. Achevée. Je m’apprête à ranger le matériel lorsque Anne-Marie me fait : << Attends, on va l’essayer ! Je filme ! >>. Je comprends. Elle tire son téléphone de sa poche, me fait un clin d’œil et pointe son index vers l’orifice. En me déboutonnant, je passe derrière l'abri. J’introduis mon sexe mou dans l’ouverture. Je reste ainsi, le bassin collé contre les planches, les mains posées à plat sur la cloison. Deux minutes. Peut-être trois. Soudain, comme une ventouse, une légère succion. Une dizaine de secondes, pas davantage. Je me retire. Je remballe en venant rejoindre ma complice. << Regarde ! >> murmure t-elle en s’approchant pour me montrer l’écran de son smartphone. C’est un selfie de toute beauté. Hautement insolite. Je la félicite. Nous rions comme des fous.

 

        << Il y a un second abri tu m’as dit ! >> lance t-elle en mettant son sac sur le dos. Je fais de même. Un contrôle de routine pour vérifier. Nous n’oublions rien. C’est reparti. C’est une fierté que de laisser derrière soi une telle réalisation. En marchant, Anne-Marie me dit : << Tu me laisseras faire l’autre. Je m’éclate bien ! >>. Nous en rions de bon cœur. Une vingtaine de minutes et nous arrivons au second abri. Presque identique au premier. Une carte géographique, une table, deux bancs. Il va être seize heures. Nous posons nos affaires sur la table. Je prépare les outils. Anne-Marie tire deux yaourts de son sac. Deux pommes. Je sors les deux mandarines, les barres de céréales et la gourde. << La santé d’abord ! >> lance ma complice. Nous savourons cette collation en revenant sur le projet de samedi soir. << Tu viens manger. Je prépare une bonne surprise. Et après on se mâte les films ! >> lance t-elle. Je la laisse préparer la perceuse. Elle fait ça très bien. Je m’apprête à filmer cette seconde réalisation. La fraîcheur s’annonce.

 

        Les planches sont verticales cette fois. Plus épaisses. Ce qui demande un temps de perçage plus long. À environ quatre vingt centimètres du sol, apparait la première petite ouverture. Anne-Marie est adroite, méticuleuse, sans précipiter un mouvement davantage que le précédent. C’est passionnant. C’est ludique, amusant et récréatif. Je filme. Je n’omets pas de faire le tour de l’abri pour m'assurer que personne n’arrive. Nous sommes seuls. C’est pourtant le lieu de promenade et de jogging des gens du bourg. Cette seconde création murale prend forme. Anne-Marie passe la peinture dans l’épaisseur de l’orifice. << Ça, c’est du boulot ! >> fait elle en se redressant. Elle passe son bras autour de ma taille. Nous restons silencieux à admirer son travail. << C’est discret, décoratif et ajoute une ambiance suggestive ! >> dit elle. Nous rions. Elle rajoute : << Tu fais un essai s’il te plaît ! >>. Je me déboutonne à nouveau pour passer derrière la cloison. Je glisse mon érection naissante dans le trou. J’entends des bruits étranges de l’autre côté.

 

        Soudain, l’effet ventouse, l’impression d’avoir mon sexe dans un bol de purée tiède. Mon bassin collé contre la cloison, mes mains à plats sur les planches, je reste immobile. Sans cesser d’observer à droite, à gauche, avec assiduité. Une légère angoisse. Cette fois l’opération "test" dure beaucoup plus longtemps. Au point que l’excitation qui me gagne m’envahit d’un plaisir intense. La position n’est pas confortable et mes lombaires se rappellent à moi. Je bouge doucement, en rythme. Il me semble percevoir des gémissements. Tout cesse. Une désagréable sensation de froid sur ma virilité. Je me retire. Je remballe en venant rejoindre ma comparse. Elle s’essuie la bouche en me souriant. Le regard espiègle. << Je fantasme sur ce truc depuis que je te connais. C’est trop bien. Salaud ! >> dit elle en passant ses bras autour de mon cou. Elle demande : << Tu es déjà allé jusqu’au bout avec quelqu’un dans ces situations ? >>. Je réponds par l’affirmative. << Raconte-moi ! >> rajoute t-elle alors que nous réunissions nos affaires.

 

        Je raconte. Il va être dix sept heures quand nous arrivons au vieux moulin. Anne-Marie fait quantité de photos. Le crépuscule s’annonce. L’atmosphère et les environs prennent une dimension magique. Un groupe de cyclistes passe à toute vitesse. Des VTT. La porte du haut bâtiment carré est toujours ouverte. L’odeur d’humus de l’extérieur disparaît. C’est à présent celle d’un vieux grenier. Les empilements de bûches. Les grands sacs en toile de jute emplit de petit bois. Anne-Marie longe les murs en disant : << Un trou ici serait de toute beauté ! >>. Nous en rions. Elle s’accroupit devant moi pour descendre la tirette de mon pantalon. << Ces endroits me donnent des idées. Surtout après avoir confectionné de belles créations ! >> dit elle. Je précise : << Il y a une heure et demi pour revenir à la voiture et il est déjà dix sept heures trente ! >>. Elle hésite. Referme la tirette, se redresse en disant : << Gardons-nous pour samedi soir alors. Mes "petits machins" seront terminés. C’est le premier jour aujourd’hui ! >>

 

        Anne-marie passe ses bras autour de mon cou. Entre deux bises, elle murmure : << J’adore être avec toi. C’est toujours hyper cool. Tu n’es jamais chiant ! >>. Nous prenons le sens du retour. Je tire la lampe frontale du sac à dos. La grande roue à aubes, bloquée par les roches, émet des craquements sinistres. << Là-bas, regarde, une forme blanche ! >> s’écrie mon amie. Il y a effectivement une silhouette vaporeuse. Comme si elle nous observait. Nous tournons les talons pour traverser le pont en pierre. Voilà le chemin. Nous nous tenons la main pour accélérer le pas. Sans nous retourner. << Put-hein, on a même vu un fantôme ! >> lance ma complice. Il est dix neuf heures quand nous revenons à la voiture. La nuit est noire d’encre. Il y a un peu plus d’un kilomètre jusqu’au "Bol d’Or", l’unique restaurant du bourg. Nous y retrouvons notre table. Les flammes dans la cheminée. Il n’y a qu’une dizaine de clients. Notre choix se porte sur le menu "chasseur". Du marcassin accompagné de nouilles façon gnocchis. Dans une sauce au vin. Deux artichauts vinaigrette.

 

       Nous savourons ce repas en revenant sur nos aventures de l’après-midi. Je félicite mon amie pour son habileté et son savoir faire. << Tu sais, quand tu es maîtresse d’école en primaire, tu dois savoir tout faire ! >> m’explique t-elle. Je l’écoute me raconter le jour où elle a fabriqué et monté des étagères pour sa classe. Quand elle a aménagé sa cuisine. Elle me montre même des photos "avant et après". << Et pas de l'Ikea ! >> précise t-elle. C’est fameux. Je reste admiratif. Elle précise : << Je n’ai jamais compté sur un mec pour m’aider. Alors j’ai tout appris toute seule. Il y a plein de tutoriels sur Youtube, c’est facile ! >>. Notre dessert. Toujours le même car c’est notre préférence. Des coupes glacées. Nous traînons à table. Et comme souvent, nous sommes les bons derniers. Il va être vingt et une heures trente. Nous nous mettons à bailler. << Demain j’ai école ! >> me fait ma complice. L’addition. Sur les trois kilomètres du retour nous mettons au point notre samedi soir. << Tu n’emmènes rien. Il y aura de bonnes glaces en dessert ! >> précise t-elle.

 

        Anne-Marie me dépose devant le portail. Trois bises. Je précise que je ne serai pas disponible pour la webcam de demain soir. Je dis la vérité. Je suis invité chez Laure. << Montre-moi des photos ! >> s’écrie Anne-Marie. Je sors mon téléphone. Elle regarde. Elle lance : << Je suis mieux qu’elle ! >>. Nous en rigolons comme des bossus. Avant de sortir de la voiture, je conclue : << Je te raconterai tout, dans le moindre détail, en webcam vendredi soir. Je te préviens, ce sera quelconque car il ne se passe jamais rien avec elle ! >>. Je regarde la voiture se dissoudre dans la brume. Une rapide toilette avant de retrouver la douceur de mes draps…

 

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07/02/2025

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