L'ECRIT DE JOIE

L'ECRIT DE JOIE

Gaëlle - (10) - Curieuse visite

 

 

                                           Une curieuse surprise

 

Je suis devant l'ordinateur à répondre à quelques courriels. Le mardi soir est souvent consacré à cette activité. J'aime y passer du temps. Le plus souvent ce ne sont que des échanges sur quelques réseaux sociaux. Des amis virtuels, principalement. Je suis concentré sur la rédaction d'un de ces courriers lorsque mon téléphone m'annonce la réception d'un message. Je m'en saisis. Je l'allume. C'est un petit mot de Gaëlle.

 

Je reste longuement à lire et à relire cette phrase sibylline "Ma mère a tout découvert. On annule tout. Je te contacte demain matin". Je reste pantois. Gaëlle est une jeune fille majeure. Il n'y a donc nul lieu de s'inquiéter. Où est le problème s'il y en a un ? Je retourne à la rédaction de mes courriels sans plus penser à cet étrange message. Il est dix neuf heures trente. Soudain, il y a un coup de sonnette. Je me lève. Je vais ouvrir.

 

Là, au bas de l'escalier, il y a une jeune femme. La quarantaine épanouie. Plutôt belle. C'est une grande femme. Les cheveux noirs et très longs. Elle est vêtue avec élégance. < Bonsoir, je suis la mère de Gaëlle ! > me fait-elle. La dame me dévisage quelques instants avec insistance. Elle continue : < Je peux vous voir. Il faut que je vous parle ! >. Je la salue poliment. Je l'invite à entrer, à me suivre jusqu'au salon.

 

La jeune femme est debout dans la grande pièce. Je la laisse prendre la température. Discrètement j'enclanche l'enregistreur vidéo. Chez moi, je filme et j'enregistre ce que bon me semble. Avec ce genre de situation et d'individus il est préférable d'anticiper. Cela permet de bien encadrer tous dérapages malvenus. Cela permet également de prévenir toutes velléités de comportements regrettables. De quelques natures qu'ils soient.

 

Je lui propose à quitter son manteau et de s'installer dans le fauteuil. La jeune femme est vêtue d'un pantalon noir à pinces et d'un pull noir. Elle est chaussée de soulier noirs à talons. Cette personne est très élégante. Bourgeoise. Elle décline ma proposition de prendre une boisson. Nous nous observons en silence. < J'ai découvert les messages que vous échangez Gaëlle et vous ! Je ne vous cache pas ma profonde consternation ! J'étais vraiment très choquée ! > me fait-elle. Je réponds immédiatement : < C'est laid de fouiller dans les messageries privées ! >. Elle me toise.

 

La jeune femme martèle chaque syllabe avec une voix appuyée. Il y a un ton volontairement menaçant. < Je veux tout savoir ! Nous en avons parlé avec Gaëlle qui reste silencieuse sur beaucoup de points ! >. Je ne dis rien. J'observe attentivement cette dame assise là, devant moi. Un peu hautaine. Je prends le même ton solennel pour répondre : < Vous n'en saurez pas plus ici ! Cela ne vous concerne absolument pas ! >.

 

La jeune femme déglutit avec peine et me fait : < Comment ? Mais c'est ma fille ! >. Je réponds en soupesant chaque syllabe : < Sans aucun doute madame, mais elle est majeure. Elle fait donc ce que bon lui semble de ses émotions, de ses sens et de sa personne ! >. La jeune femme semble perdre un peu de son air altier pour changer de ton. Elle semble même perdre un peu de sa superbe pour me dire : < Oui ! Mais elle vit à la maison. Elle est étudiante. Elle a quand même quelques comptes à nous rendre ! Vous ne pensez pas ? >.

 

Je reste silencieux. Je regarde la jeune femme qui rajoute : < Mon mari, son beau père, n'est pas au courant ! Heureusement ! >. Je m'installe encore plus confortablement dans le canapé. Il en faut beaucoup plus pour me déstabiliser. Je réponds : < Heureusement quoi ? Une menace ? Vous vous croyez où ici ? >.  La dame est à présent décontenancée. Je rajoute, dans mon bon droit : < Votre fille est majeure. Et je vous rappelle que vous lui devez le gîte et le couvert jusqu'à ses 25 ans ! >. Il y a un nouveau et profond silence. Je ne suis pas du tout homme à me laisser impressionner. Surtout en n'ayant rien à me reprocher.

 

La jeune femme joue sa dernière carte. Elle me regarde froidement. Je devine une colère sourde poindre. Je tiens toutefois à la rassurer. Je prononce ces mots qui semblent beaucoup la calmer : < Madame, je comprends vos interrogations. Gaëlle est une fille brillante. Elle sait parfaitement ce qu'elle fait et ce qu'elle veut. N'oubliez pas que vous aviez vous aussi 20 ans. Et il n'y a pas si longtemps, il me semble bien ! >. La jeune femme semble se détendre un peu. Je conclue en précisant : < Vingt ans avec tout ce que cela sous entend ! >.

 

Je continue en affirmant : < Rassurez-vous. Je vais faire le nécessaire pour raisonner cette jeune fille. Comprenez bien que c'est à elle seule de prendre une décision. Avec son caractère bien trempé, toutes tentatives de contraintes seraient vouées à l'échec ! >. La jeune femme sait très bien que c'est la seule issue à cette situation délicate. Je précise : < Je me mets à votre place en expurgeant le coté possessif ! Ce n'est pas à vous de décider pour elle. C'est sa vie affective. Pas la votre. Gaëlle ne vous appartient pas ! C'est un être libre et indépendant ! >. Il y a le silence.

 

Ces vérités cinglantes, que j'assène volontairement d'un ton froid et détaché, achèvent de mettre fin à toutes velléités agressives de la part de la dame. Les choses redeviennent calmes et pondérées. Nous restons longuement silencieux. Je termine de la rassurer en lui précisant : < Faites-moi confiance. Moi aussi je suis dépassé par ces évènements. Je vais faire au mieux ! >. La jeune femme semble soulagée. Il y a le silence à nouveau.

 

A présent, la dame m'observe. C'est un peu comme si elle me scrutait. Elle prend sans doute conscience que je suis un homme normal. Que je n'ai rien du pervers, du satyre ou encore du déviant. < Je vous fais confiance ! > me fait-elle soudain. Je réponds : < Ce n'est pas une question de confiance. Je vous répète encore une fois que je n'ai aucune décision à faire prévaloir ! C'est Gaëlle qui décidera. Ni vous, ni moi ! >. Devant cette évidence la jeune femme reste comme prostrée dans une longue introspection.

 

Je me lève. Mettant ainsi fin à la conversation. La jeune femme se lève. Elle semble un peu embarrassée. < Vous comprenez, mon devoir est quand même de m'inquiéter du bien être de ma fille ! > me fait-elle encore. Je lui passe son manteau en répondant : < Je crois que ça aussi, son bien être, elle seule peut l'assumer ! Restez donc confiante. Gaëlle est promise à un avenir brillant. Elle est redoutablement intelligente. Elle sait ce qui est bien pour elle ! >. A ces mots, la dame semble un peu reprendre la maîtrise de ses émotions.

 

Je la raccompagne jusqu'au jardin. Elle reste devant moi. Tout comme Gaëlle, elle est de haute taille. Elle ne me toise plus. A présent la dame paraît beaucoup plus conciliante. Mes propos ainsi que ma personnalité ont sans doute achevé de la convaincre de mon attitude parfaitement honnête. Je la laisse partir vers le portillon. Je rentre. Je retourne à la rédaction de mes courriels.

 

Je reçois un nouveau message sur mon téléphone. Je regarde. Gaëlle m'écrit : "On se calme quelques temps". Je ne réponds pas...

 

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10/03/2017

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