L'ECRIT DE JOIE

L'ECRIT DE JOIE

Gloryhole - Épisode 6

                                                      Découvertes insolites

 

Les jours rallongent. Chaque matin, dans mon atelier, je découvre une luminosité plus évidente. Je peins alors dans les toutes meilleures dispositions. Depuis quelques jours je n'allume même plus la cheminée. Il subsiste alors cette odeur typique des feux éteints. Avec ce soleil, hors de questions de travailler après le repas de midi. Je profite de ces journées de printemps pour organiser mes randonnées. Les chemins forestiers sont enfin secs. De les parcourir ainsi est beaucoup plus agréable que lorsqu’ils subissent les pluies de plusieurs jours. Rien n’est plus détestable que lorsqu’ils deviennent boueux. Je mets donc à profit chacune de ces sorties pédestres pour faire un de mes circuits "trous". Tout en faisant l'assaisonnement de la salade, je me projette déjà mentalement dans mon itinéraire de promenade. Dès la vaisselle terminée, je me hâte. Je monte les escaliers en courant. Je me lave les dents dans une sorte de fébrilité grandissante.

 

Ce mercredi après-midi, une fois encore, je prépare mon petit sac à dos. Les victuailles et le matériel. Soudain, la sonnerie à l'ancienne de mon I-phone. C'est Anne-Marie. Elle vient aux nouvelles. Elle sait que je ritualise mes mercredis comme si mon ancienne compagne disparue était encore là. Nous bavardons un peu. Une nouvelle fois frustrée de ne pouvoir m'accompagner Anne-marie me promet de me rappeler tout à l'heure, vers seize heures. Je vais faire quelques photos. Ainsi elle pourra apprécier les belles images. Mon short kaki. Ma chemisette brune. Mes souliers de marches. La casquette Lidl que j'aime à porter par auto dérision. Son ridicule me fait tellement rire. C'est parti. Il y a une vingtaine de kilomètres jusqu'aux circuits des collines. Je gare la voiture sur le parking du restaurant. Il n'est que quatorze heures quinze et il y a quantité d'autos stationnées là. C'est surprenant de découvrir à chaque visite l'évolution des couleurs, les aspects surprenants que prend la végétation.

 

Comme à chaque fois, plein de gens sur la terrasse extérieure du restaurant. Je la contourne par la droite pour prendre immédiatement à gauche. Au départ du sentier, il est toujours sympathique de découvrir les couleurs de la nouvelle saison. Des bourgeons éclatent, libérant les jaunes et les blancs des premières floraisons. Le sol pierreux du chemin est tellement sec que la terre est poudreuse. Les teintes sépias de l'hiver font place à celles du printemps revenue. Le vert domine avec ses infinies nuances. Chatoyantes. Ce qui confère aux arbres une beauté solennelle. Je marche d’un bon pas pour pouvoir faire mon circuit en pleine lumière. Les journées rallongent mais le crépuscule tombe vers dix neuf heures. L'heure d'été n'est pas encore entrée en vigueur. Ce sera pour le week-end prochain. Je garde présent à l'esprit que la luminosité déclinante de la fin d’après-midi peut s’avérer piégeuse. Dangereuse et rédhibitoire. Tiens ! À nouveau la sonnerie de mon I-phone.

 

Sans m'arrêter je décroche. C'est monsieur Philippe, mon comptable. Il est également un bon ami, collectionneur, qui possède quelques une de mes toiles. Philippe m'apprend qu'il secondera le commissaire priseur lors d'une vente aux enchères vendredi après-midi. Il m'invite car seront proposée à la vente une de ces commodes victoriennes que j'apprécie. Je promets d'être là. Tout en marchant, je croise nombre de randonneurs. Je hume à plein poumons les effluves parfumées de cette forêt enchanteresse. Des papillons virevoltent. Ce sont les précurseurs, peut-être en avance. Voilà la première station. Un trou magnifique que l'on découvre en contournant la palissade d'un jardin privatif. Je continue mon petit bonhomme de chemin. Les dix premiers trous visités présentent un état de conservation absolument parfait. Par contre, lorsque j’arrive à la station onze, je découvre un accident. Nulle intervention humaine cette fois. C'est une cause naturelle qui est responsable de ce désastre. La planche, véreuse et vermoulue, s’est tout simplement effondrée. Il faut donc la remplacer ou percer dans une planche voisine. J’opte pour la seconde solution. Plus pérenne.

 

A ma prochaine visite, il me faudra emmener une planche en bon état. Planche que je vais récupérer dans la réserve de la station sept. À l'endroit où sont les deux cabanons de pêche. La rive Est du lac est prolongée de deux étangs où sont élevées des carpes. Leurs alevins sont utilisés pour repeupler les rivières. Rapidement, je prépare mon matériel. Mon petit sac à dos posé sur une des grosses pierres. Je réfléchis. J'anticipe mentalement la procédure la plus idoine. Je m'applique et je perce l’orifice. Petite mèche de six millimètres pour amorcer le perçage. Puis le trépan pour creuser un orifice de cinq centimètres de diamètre. C'est la largeur "standard". Rare sont les chibres atteignant cette dimension. Cette pensée me fait rire aux éclats. Je ponce soigneusement les bords au grain fin. J'aime fignoler. Donner un poli ivoirin sur les bords de mes créations circulaires. En passant l'index, c'est aussi lisse qu'une vitre. Je me penche pour mieux apprécier le fini.

 

Une vingtaine de minutes d’un labeur simple et rapide. Je prends une photo. J'ai le petit support à selfies. J'y fixe mon I-phone. Je règle sur le déclenchement automatique après dix secondes. Le temps d'ouvrir ma braguette, d'en extraire le locataire, de passer derrière la palissade, d'introduire mon sexe dans ce magnifique trou tout neuf. C'est toujours une émotion d'inaugurer ainsi une création murale toute neuve. Le film ne dure que trente seconde. Je prends une fois encore conscience que je m'entoure d'aucune précaution. Trop impatient d'essayer mon nouveau trou. Heureusement il n'y a personne. Je reprends ma balade. Le dix huitième trou, dernier du circuit, sur la descente, a probablement servi. En effet, sur la face extérieure, donnant sur l'étang, le long de la planche, il y a des coulures. Du sperme mélangé à du liquide séminal a sans doute séché là, laissant des traces jusqu’au bas de la planche. J'en éprouve un frisson de dégoût.

 

J'essaie de ne pas y penser. D'occulter ce détail dégueulasse. Je me penche pour constater que tout est en état parfait. Hors de question de passer mon index sur le périmètre intérieur de ce trou. Même si je ressens une profonde fierté à l'idée qu'une de mes créations ait procuré un peu de plaisir à quelques esthètes. Je m'accroupis. J’inspecte l’herbe au bas de la cloison afin de vérifier si rien n’a été oublié là. Soudain, dans l'herbe entre les résidus de feuilles jonchant encore le sol, l'éclat d'un objet métallique attire mon attention. Avec prudence, j'écarte les tiges de pissenlits. Les fougères naissantes. C'est un trousseau de clefs. Deux. Un porte clefs en forme de fer à cheval. Par association d'idées je pense à la jeune cavalière de la semaine dernière. Deux clefs qui semblent êtres celles d’une serrure de porte. Clefs standards. Sans doute perdues par les protagonistes qui ont profité de l’opportunité de ma création murale. Moi qui suit prêteur, partageur et altruiste, je ressens soudain une profonde satisfaction. J'ai en quelque sorte rendu service à quelques amateurs avertis.

 

Je tire le paquets de mouchoirs en papier de mon sac. J'en déplie un pour saisir l'objet. Je ramasse l'objet en me promettant de le ramener, au retour, à la gendarmerie du bourg voisin. J'ai toujours un petit flacon d'essence à nettoyer. Ce qui me permet de rendre leur éclat à ces deux clefs. De les toucher sans crainte. Cette perte a peut-être été la cause d’un tourment sinon d’une certaine angoisse. Revivons cet instant où nous découvrons la perte d'un objet important. Cela nous projette dans un état d'esprit désagréable. Je me mets à la place de la personne qui a perdu ses clefs. Ce sont des clefs de serrures de sécurité. Épaisses, lourdes. Je les glisse dans la pochette avant de mon sac à dos. Je prends l'itinéraire du retour qui contourne le lac sur sa rive droite. La sonnerie de mon I-phone. C'est Anne-Marie. Je lui raconte mon aventure de l'après-midi, ma trouvaille. Elle découvre la photo et le film de trente secondes.

 

<< C'est magnifique. On la voit super bien. Elle se détache à merveille sur les planches claires ! >> s'écrie t-elle. Je lui explique la méthode utilisée cette fois. Oui, car chaque réparation exige quelques efforts d'imagination. << C'est dégueu les coulures ! >> s'exclame t-elle. Je dis : << Ce ne sont pas les miennes ! >>. Je l'entends rire aux éclats avant qu'elle ne rajoute : << J'espère bien. Je veux avoir la primeur d'en apprécier les premières de visu ! >>. Cette fois c'est moi qui rigole comme un bossu. Je marche en bavardant. En fin d'après-midi la fraîcheur vient me rappeler que nous ne sommes encore qu'à la fin du mois d'avril. Anne-Marie a passé une partie de l'après-midi à ses préparations. Puis elle est allée faire des courses. Elle aussi a toujours d'amusantes anecdotes. Il arrive souvent des choses imprévues aux belles femmes. Je suis plié de rire en arrivant à la voiture. Nous nous saluons. << Je t'appelles demain ! >> conclue t-elle.

 

J'arrive au bourg. La gendarmerie est située à côté de l'école primaire. Je gare l'auto. Je reconnais la gendarme de l'accueil. Une belle jeune femme souriante. Je comprends qu'on puisse fantasmer sur l'uniforme. Elle passe quelquefois avec un collègue lors d'un îlotage de surveillance. Nous bavardons un peu. Je remets le trousseau de clefs trouvé. << Ça va être très facile. Ce sont des clefs de sécurité interdites de reproduction. Il y a un numéro d'immatriculation là, regardez, on va trouver très vite à qui elles appartiennent ! >> m'explique la gendarme en me montrant les lettres et les chiffres gravés. Je fais une rapide déposition. Bien évidemment je n'entre pas dans le détail. Même si là, en présence de cette ravissante militaire, j'y entrerais volontiers. Elle doit deviner mon doux tourment car lorsque nous nous saluons, elle m'adresse un merveilleux sourire. Elle conclue : << Je peux donner vos cordonnées si le propriétaire veut vous remercier ? >>

 

Je réponds : << Bien sûr. N'hésitez pas ! >>. Je quitte la gendarmerie alors que le crépuscule s'amorce déjà. Il va être dix neuf heures. Je reviens chez moi pour dix neuf heures trente. Mort de faim. Juste pour la tombée de la nuit. La soirée est fort agréable. Le lendemain, à dix neuf heures tapantes, je reçois le coup de téléphone d’une dame qui me remercie pour le dépôt des clefs à la gendarmerie. Je suis sous le coup d'une certaine émotion. Nous bavardons un peu. Cette dame se présente. Juliette. Elle tient une agence immobilière. Je meurs d'envie de lui demander pourquoi j'ai trouvé ses clefs au bas d'un Gloryhole. Je n'ose pas. Je n'ai pas la présence d'esprit de ruser. C'est elle qui ouvre la boîte de Pandore. << Vous vous baladez souvent par là ? >> me demande t-elle. J'attrape évidemment la balle au vol. Je réponds : << Je suis un passionné de randonnées. Et je pratique souvent sur ces sentiers ! >> Un silence. J'ai la méchante envie de me présenter comme créateur mural. Les clefs que j'ai trouvé sont celles de ses bureaux et d'une maison vide que Juliette fait visiter aux clients éventuels.

 

Je me jette à l'eau. Je demande : << Si vous êtes tentée, je vous propose de faire le guide et de vous faire découvrir de magnifiques sentiers. Et nous terminons par un bon repas au restaurant au bas des collines ! C'est moi qui invite ! >>. Un nouveau silence. Je rajoute : << Soyez originale, dites oui ! >>. Je l'entends rire. Elle finit par répondre : << Pourquoi pas ! Je peux me libérer les samedis à partir de quatorze heures. J'ai vos coordonnées, je vous rappelle. OK ? >>. Je la remercie. Je donnerais cher pour savoir à quoi peut bien ressembler cette femme dont la voix m'enchante. Elle ne s'attarde pas. Les femmes ne s'attardent jamais après une invitation verbale et une réponse évasive. Peut-être comme gênée de ne donner une suite sans avoir longuement réfléchi à cette proposition.

 

Juste avant qu'elle ne raccroche, je précise : << Deux inconnus partageant un repas dans un endroit charmant. C'est comme dans un film Hollywoodien ! >>. Je l'entends rire. << Au revoir ! >> se contente t-elle de dite. Elle a raccroché. Je me sens réellement con. Je ne sais jamais comment m'y prendre avec les femmes. Je n'ai pas son numéro. Quand j'interroge mon téléphone, l'écran affiche "secret d'appel". Je murmure : << Salope ! >> avant d'éclater de rire. De me moquer de mes dragues ridicules, stupides et maladroites. Et si je lui avais expliqué que j’étais le créateur mural ? Que j'étais celui qui décorait les cabanons de magnifiques Gloryholes ? Peut-être en aurait elle été ravie. Je l'aurais invité à découvrir mon circuit pour une randonnée commune. Elle aurait peut-être accepté avec joie. À ces pensées, je me masturbe un peu avant d'aller au salon pour allumer l'ordinateur. Me palucher sur un de mes sites préférés. "Japanese blowjobs uncensored".

 

Je n'arrête pas de me faire le film d'une hypothétique prochaine rencontre...

 

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05/01/2024

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