L'ECRIT DE JOIE

L'ECRIT DE JOIE

Gloryhole - Épisode 7

                                               Juliette me propose une randonnée

 

   Confortablement installé dans un de mes profonds fauteuils je suis plongé dans une lecture passionnante. "Le matin des magiciens" de Louis Pauwels et de Jacques Bergier. Ce vendredi soir de printemps est d'une douceur étonnante. Soudain la sonnerie de mon vieux téléphone fixe. Cet objet de collection de cuivre et de bois qui remonte aux années trente du siècle dernier. Et toujours en parfait état de fonctionnement. Je me lève pour aller décrocher. Le combiné à l'oreille, le micro devant la bouche. Quelle surprise. C'est la dame des clefs. Juliette se présente comme telle. Je la rassure. J'ai immédiatement reconnu sa voix. Nous bavardons en échangeant quelques lieux communs. J'aime bien les silences entre ses phrases. Une particularité qui m'interroge. << Vous arrive t-il d'aller randonner le samedi après-midi ? >> me demande t-elle soudain. Je reste silencieux à mon tour. Cette question a de quoi me surprendre. Je m’empresse de confirmer qu'il m'arrive évidemment d'aller randonner le samedi. La météo plutôt agréable, prévue pour le week-end, permet même d'envisager cette possibilité.

 

   Même si je n'ai encore rien prévu. Juliette respecte autant mon mutisme que je respecte les siens. Cette demande suscite dans ma psyché un sentiment fort plaisant. La jeune femme finit par dire : << Vous n'imaginez pas à quel point je suis heureuse d'avoir retrouvé mes clefs. Je vous suis redevable. Enfin c'est ainsi que je vois les choses ! >>. J'écoute avec une grande attention. Comme on lit entre les lignes, je tente de comprendre entre les mots. Cet aveux agit sur ma psyché un peu à la manière d'une caresse. Je devine la profonde reconnaissance dont fait preuve Juliette. Toute heureuse de les avoir retrouvé, grâce à moi, je devine son sentiment. Je le comprends d'autant mieux pour l'avoir moi-même vécu il y a quelques années. Mais avec une pochette contenant mes pièces d'identités. Je perçois parfaitement son état d'esprit. Cette fois, le silence dure. Je ne sais pas comment amorcer la suite de la conversation. Je me sens stupide.

 

   J'attends que soit elle qui prenne l'initiative d'une suite à cette discussion. Est-elle dans le même embarras ? Je sens que la balle est dans mon camps. Il est urgent de l'attraper au vol avant qu'elle ne tombe de l'autre côté de la clôture. C'est un peu comme si cette phrase m'échappait : << Et en soirée nous nous offrons ce restaurant dont je vous parlais hier soir ! >>. Nous jouons avec les silences comme le font les virtuoses de leurs instruments. Je me lance une nouvelle fois pour briser ce silence devenu frustrant. Je propose à Juliette de passer la prendre à l’endroit de son choix. Elle répond enfin et spontanément. << C'est une bonne idée ! >>. Nous passons en revu les endroits que nous connaissons. La jeune femme habite dans la banlieue de la ville voisine. Une vingtaine de kilomètres de chez moi. Juliette revient sur son enthousiasme. Un revirement tout aussi étonnant. Après-tout, nous sommes de parfaits inconnus l'un pour l'autre.

 

    Juliette a alors cette suggestion toute féminine mais judicieuse. Rendez-vous est tout simplement fixé au départ du sentier. Sur le parking du restaurant. Je demande : << Si vous êtes libre en soirée, je réserve une table. On y mange très bien. C'est convivial et campagnard. Nouveau silence. Celui-ci devient agaçant. Que d'hésitations inutiles dont s'encombrent souvent les femmes. J'ai envie de dire : << Allez bon sang, on se lance ! >>. C'est comme si Juliette devinait mon état d'esprit. Aussi, elle répond : << D'accord ! Mais je suis une "couche tôt". Je fais mon jogging avec une amie le dimanche matin ! >>. Je ne peux m'empêche de lâcher : << À la bonne heure ! On fait comme ça alors ! >>. Comme soulagée, Juliette change de ton pour me confier être une grande sportive. Comme je le suis également, nous échangeons quelques anecdotes sportives. Je suis culturiste. Je suis donc toujours vigilant quand à mes apports caloriques. << Je fais attention moi aussi ! >> précise la jeune femme. Nous bavardons encore un peu avant le mot fatidique qu'elle lâche : << Bon ! >>.

 

   Ce qui annonce la fin des bavardages. Nous nous saluons. Je raccroche. Je reste dubitatif. Dans quoi me suis-je encore engagé ? C'est ma première interrogation. Je retourne à ma lecture. Impossible de me concentrer sur le paragraphe que je lis deux fois sans le comprendre. Je suis en pleine transcendance. Ce phénomène qui pourrait me faire relire vingt fois les mêmes phrases sans en comprendre le sens. Mon esprit partant en vadrouille dès le troisième mot. Cet état mental m'amuse. Subrepticement, du plus profond de mon être monte une excitation. Je me dis à plusieurs reprises : << Tu as rendez-vous avec une meuf demain, Julien ! Tu te rends compte ? Un nouveau "plan" ! >>. En allant m'assoir devant mon ordinateur, je me surprends à esquisser un tango pas du tout Argentin. Tournant sur moi-même en me demandant à haute voix : << Et si c'est une moche ? Une petite grosse aux cheveux courts. Aux pieds plats ? >>

 

   Je me mets à rire. C'est vrai, je n'ai absolument aucune idée du physique de mon rendez-vous de demain. Soudain la petite voix au fond de moi : << Si elle est sportive, la petite grosse, tu peux déjà laisser tomber. Sacré Julien va ! >>. J'allume mon ordinateur pour aller directement sur un des sites Japonais que j'affectionne. C'est personnel mais pour moi ce sont les meilleurs. Les filles sont souvent belles, vicieuses. C'est crade et bien dégueu. De plus je connais les sites qui proposent des films entre une et deux heures non floutés. Totalement gratuits. J'ouvre ma braguette. J'en extrais le locataire. Le film de ce soir est consacré à ces fausses "journalistes" qui présentent des informations Japonaises bien réelles. La parodie est une réussite exemplaire. La "présentatrice" est belle comme un levé de soleil sur le Fujiyama. Au bout de quelques minutes un type en short lycra noir vient frotter sa bite sur son merveilleux visage d'innocente.

 

   S'en suivent des cascades incessantes du foutre d'une dizaine de protagonistes dont ne voit jamais que le sexe. Ces petits sexes Japonais que semblent savourer ces adorables jeunes filles merveilleusement délurées. Des amatrices à voir leurs réactions, leurs attitudes. C'est divin. Je me masturbe en bénissant le Japon et sa culture cinématographique "Zen". Pour un peu je me mettrais presque en position de méditation. C'est extraordinaire, j'en oublie Juliette. Et surtout le tourment qu'elle a éveillé en moi. Je visionne l'intégralité du film jusqu'à la présentation météo sur Tokyo. Lorsque la jeune présentatrice fait pipi debout, en souriant à l'objectif de la caméra, devant la carte du Japon. Désignant la région d'Hamamatsu de son index gracile. Zoom de la caméra pour nous montrer le sperme qui fait office de shampoing sur sa magnifique chevelure d'un noir de jais. Je me pignole ainsi jusqu'aux environs de vingt trois heures. J'aime à rester sans éjaculer. Sublime.

 

    Je ne fais qu'appliquer la philosophie toute orientale de "rétention" de la substance vitale. Afin de me charger de la fameuse "Kundalini". Cette énergie des profondeurs. Ce qui me prédispose d'ailleurs à une bonne nuit de sommeil. Il est sept heures quand je me réveille. Je déteste traîner au lit. Mon jogging et mon entraînement m'attendent. Avant ma douche et les courses à l'hypermarché. Je téléphone au restaurant des collines. J'y réserve une table pour dix neuf heures. Il est midi quand je me prépare une bonne platée de spaghettis. Accompagnée d'une salade de carottes. D'un dos de cabillaud blanc poêlé. Comme si je trichais avec moi-même je fais semblant d'occulter mon état de plus en plus fébrile. La vaisselle. Je monte me laver les dents. Je m'inspecte dans le miroir. Avec le rasoir stylo, je me débarrasse de tous les petits polis désobligeants. Dans les narines surtout. Quelle horreur quand dépassent des poils de nez. Je veille à mon allure. Comme un adolescent pour son premier rencard.

 

    Treize heures quinze. Me voilà parti. Il y a vingt cinq kilomètres jusqu'au parking du restaurant. La circulation est fluide. J'arrive pour treize heures quarante cinq. Il y a déjà de nombreuses voitures garées là. C'est samedi. Il y a davantage de fréquentations. Le lieu est le départ pour les différents chemins. Je change de godasses pour des croquenots de marche. Mes fidèles Queshua de randonnées. Je vérifie le contenu de mon petit sac à dos. Cet après-midi encore je trimballe mon matériel. Ma perceuse et les accessoires. Au cas je serais victime d'un "lapin", je ne serai pas venu pour rien ni les mains vides. Sinon c'est en secret que je ferai la vérification de mes créations murales. Je mémorise l'itinéraire de la promenade à venir. Sur celui que j'initie mentalement nous arriverons au dernier trou que j'ai baptisé le "trou des clefs" par la rive Ouest du lac. Très beau sentier. Surtout qu'avec ce soleil, la végétation est luxuriante. Verte partout.

 

    Une Audi blanche arrive, roulant lentement entre les autos pour se garer à une trentaine de mètres. C'est une jeune femme brune. La quarantaine. Je me dis : << Put-hein, si c'est mon rendez-vous, j'ai gagné au Loto ! >>. Elle ne m'a pas vu. Ma grosse berline Allemande attire pourtant l'attention. Je la regarde. Elle s'ajuste dans son miroir de courtoisie. Elle tourne la tête. Son visage encadré de longs cheveux presque noirs, aux vagues légèrement ondulées. Je sors de la voiture. Elle sort de la sienne. Je crois bien que nos surprises sont identiques. On le sent bien quand le courant passe instantanément. Juliette est grande. Mince. Le physique presque "insolent" de la sportive. Nous nous sourions. Je suis en short et T-shirts, exhibant mon physique de culturiste. Elle est en short, T-shirt. Sublime. Nous fermons nos voitures avant de nous rejoindre. Il y a un immense soulagement qui m'étreint subitement. Nulle petite grosse aux cheveux courts à l'horizon...

 

    Nous nous dirigeons l'un vers l'autre. Nous nous serrons la main. << Bonjour ! >> faisons-nous en même temps avant d'en rire. Je demande : << Juliette ? >>. La jeune femme répond : << Julien ? >>. Nouveau prétexte à sourire. Nous comparons nos petits sacs à dos. Dans le mien des barres de céréales, deux pommes. Une gourde d'eau. La minuscule paire de jumelle. Un mini parapluie, un K-ways. Mon matos à trous. Dans le sien un sweat, deux oranges. Des petits gâteaux aux céréales "bio". Nous prenons le sentier de droite qui contourne le restaurant. La terrasse est pleine de gens attablés. Nous sommes obligés de marcher l'un derrière l'autre. J'ouvre la marche. Une cinquantaine de mètres jusqu'au pont en dos d'âne qui enjambe la rivière torrentueuse. À gauche, le sentier devient chemin au bout d'une centaine de mètres. Nous pouvons enfin marcher côté à côte. Nous bavardons. Juliette s'avère une femme très cultivée, très intelligente.

 

    Elle me parle de son entreprise. Une agence immobilière spécialisées dans les locaux commerciaux. Principalement à vocation médicale. Comme toutes les femmes mariées, Juliette ne manque pas de glisser l'existence de son mari dans la conversation. Un peu comme pour placer des jalons sur le terrain tout neuf de notre projet de l'après-midi. J'écoute. Beaucoup plus que je ne parle. Mais Juliette s'avère une rusée stratège pour emmener la conversation sur mes activités, ma vie. Elle est étonnée de me savoir seul. Je lui confie que sans avoir marié je suis veuf d'une compagne avec qui j'ai passé près de vingt ans de mon existence. Que j'en ai fait le deuil mais qu'une certaine solitude parsemée d'aventures me convient parfaitement dans cette période de mon existence. << Des aventures ? Des trucs sympas ? >> me demande t-elle soudain espiègle. Paraissant très intéressée. Je refuse d'en révéler davantage pour le moment. Je donne souvent le lien de mon Blog. Tout y est raconté, relaté, narré dans les plus infimes détails. Mais là, je préfère attendre. En découvrir un peu plus sur ses goûts.

 

    Sur le chemin, tout en bavardant, tout en marchant, je vérifie secrètement mes trous. Nous passons devant la septième station. Jusque là toutes mes créations murales sont intactes. Je ne sais pas si Juliette y prête attention ou si elle fait mine de ne rien remarquer de particulier. Ce mystère me passionne, m'excite. J'ai envie de m'arrêter devant chacun de mes trous pour le présenter. Pour annoncer fièrement que j'en suis le créateur. L'auteur. Le génie du perçage à la Black & Decker. Je n'en fais évidemment rien. C'est un peu frustrant. Je déteste rester dans le mensonge. Même par omission. Si seulement Juliette pouvait montrer du doigt un de ces orifices en demandant : << C'est quoi ? >>. Toujours est-il que je découvre une jeune femme de quarante ans ans, pleine d’humour, d'optimisme, de joie de vivre et capable de dérision. Le rêve. Elles sont souvent chiantes et pas très intéressantes quand elles sont "canon". Ce qui me passionne immédiatement c’est la culture générale dont fait preuve cette femme. J'écoute. J'aime écouter les femmes.

 

    Juliette peut parler d'Oscar Wilde en citant des passages entiers du "portrait de Dorian Gray". Juliette peut évoquer Gustave Courbet en me parlant de la ville natale du peintre d’Ornans dont elle a visité la maison musée. La vie publique de Salvador Dali n'ayant aucun secret pour elle. Je suis enchanté de me retrouver en si bonne compagnie. Je n'ai qu'à écouter, à me laisser bercer par ses connaissances en histoires médiévales. Nous pouvons donc rester dans des préoccupations intellectuelles et cérébrales. Les meilleures. Je m'arrête devant mon chef d'œuvre numéro sept. Celui du stock de planches. J'ai prévu mon arrêt car il y a là un banc. La vue sur le lac depuis les hauteurs est superbe. Je demande : << Comment se fait-il qu'avec vos intérêts vous exerciez dans l'immobilier ? >>. La jeune femme éclate de rire. Elle tire une des deux oranges de son sac qu'elle me tend. Je lui tends une pomme. << Mon intérêt ? Mais il est purement financier cher Julien ! Le pognon ! >> répond t-elle avant de rajouter : << Je gagne bien mieux ma vie qu'en restant professeur. Ce que j'ai été durant dix ans ! >>

 

    Je suis admiratif. C'est un aveux dont elle me gratifie. Je daigne enfin parler un peu de moi. Riche hériter d'une fortune familiale, consacrant mon existence au dilettantisme. Pratiquant la peinture par passion autant que pour avoir une occupation. Créateur occasionnel de trous. La jeune femme m'écoute. Je lui confie être moi aussi à la tête d'un patrimoine immobilier que gèrent mon expert comptable et mon notaire. Je sens bien que je suscite soudain un intérêt accru chez mon interlocutrice. Je marque un point. Je parle un peu de ma famille. De la noblesse Écossaise dont je suis issu. Parti sur ma lancée j'aborde le domaine de mes fantasmes mais sans entrer dans le détail. La jeune femme est tout autant intéressée. Je trouve ça absolument génial. Autant y aller franco. Je m'entends dire : << Le trou sous lequel j'ai trouvé vos clefs est une de mes créations ! >>. Le silence est soudain lourd. Même le gazouillis des oiseaux a cessé. Ai-je fais le con ? N'aurait-il pas été préférable de me taire ?

 

    Je joue avec mes doigts comme un collégien attendant sa sentence. Quelle sera la punition qui me sera infligée ? C'est un énorme éclat de rire qui me fait fondre de soulagement. << Sans déconner ? >> hurle t-elle entre deux rires sincères qui viennent du plus profond de son être. Que c'est beau. C'est merveilleux une femme qui rit à s'en tordre. Elle se lève, s'accroupit, devant moi à quelques mètres pour répéter : << Sans déconner ? Comme un gosse ? >>. Je suis gêné. Je me sens vraiment comme un gamin surpris dans une de ses conneries. Elle boit de l'eau de sa bouteille. Je dis : << Oui, comme un gosse ! >>. Juliette me regarde avec la compassion d'une infirmière en psychiatrie devant un de ses patients. C'est moi qui me met à rire. J'en ai rapidement mal au ventre. Juliette se relève pour lancer d'une voix sentencieuse et avec le plus grand sérieux. << Vous, je vais pas vous lâcher avant de tout savoir ! >>. Je reste à la fixer. Un peu inquiet.

 

    << Un type de quarante deux ans qui fait des trous dans les murs ! Soit ça relève d'une pathologie mentale, soit c'est le dernier des pervers ! >> s'exclame Juliette. Elle revient s'assoir pour rajouter : << Dans les deux cas ça mérite une analyse approfondie. J'ai justement une vocation d'analyste ! >>. Nous éclatons de rire. Elle se retourne en disant : << Le trou, là, c'est vous ? Tout comme ceux qu'on a croisé en montant ? >>. Penaud, comme un adolescent surpris en pleine masturbation, je me contente d'un : << Oui ! >> que je chuchote. Juliette s'écrie : << Tu comprends que je veuille en savoir davantage sur ton "cas" ? >>. Je réponds : << Oui docteur ! >>. Ce tutoiement subit achève de me rassurer. Je confie à Juliette l'origine de ma passion pour les trous. Un site porno "Gloryhole secrets" que j'ai découvert il y a peu. Dix neufs euros la semaine pour avoir droit à un abonnement aux exclusivités des dernières productions. Juliette m'écoute amusée. << Mon amant connaît aussi ! >> lance t-elle.

 

    Juliette est à la fois amusée et charmée par mes révélations. Autant que par mes créations murales. Je lui apprends l'existence d'Anne-Marie ma meilleure amie. << Attention, je suis exclusive et terriblement jalouse. J'ai un comportement de panthère ! >> m'avoue la jeune femme. Je ris. << Ne riez pas monsieur vous pourriez y risquer vos yeux, je griffe ! >> rajoute Juliette. C’est suffisamment original pour susciter nos intérêts. Je lui explique la genèse de chacun des orifices percés par mes soins virtuoses. Elle ne manque pas d’évoquer les petits plaisirs sous entendus derrière tous ces trous. En parfait gentlemen, je reste volontairement dans la pure vue de l’esprit et dans l’hypothétique. Qualités que semble apprécier tout particulièrement la jeune femme. Il est évidemment hors de question de passer au test, à la pratique. Je reste dans l'hypothèse, dans le conditionnel, dans le pur verbiage démonstratif et narratif. J'avoue avoir fréquenté quelques Gloryhole à Amsterdam avec mon ancienne compagne disparue. << Partageur et échangiste, je constate ! >> lance Juliette. Je confirme. Nous en rions beaucoup. Un peu bêtement, je me justifie : << C'était il y a dix ans ! >>

 

Juliette se lève. À cette septième station, je récupère, dans la pile, une planche en excellent état. Je la prends sous le bras. Il me faut remplacer la planche de la station onze. J’explique tout cela à Juliette qui est à se réjouir de se retrouver mon assistante et ma partenaire. Elle est évidemment pliée de rire et la conversation reste à présent axée sur les sexualités déviantes dont Juliette semble partager les penchants. Nous arrivons à la station onze. Rapidement, tirant le matériel de mon sac à dos, je me mets à la tâche. La jeune femme, adroite de ses mains, m’aide avec une efficacité remarquable. Juliette découvre avec consternation le matériel que je tire de mon sac. << C'est surréaliste. Je me pince pour être sûre de ne pas rêver ! Vous trimballez tout ça ? >> lance t-elle à plusieurs reprises. Nous n'arrêtons pas de rire. Doucement, imperceptiblement Juliette devient ma complice de jeux. Nous sommes là comme des gamins à "jouer".

 

     Nous arrachons la vieille planche vermoulue. Je dispose la nouvelle. Juliette la tient fermement. Je prends ma visseuse-perceuse Black & Decker. Je demande : << Prête ? OK ? >>. Juliette de l'autre côté répond : << OK ! >>. Je perce en disant : << Attention les doigts ! >>. Je fixe la nouvelle planche avec quatre vis. Puis, je perce le trou idéal de cinq centimètres de diamètre. La jeune femme contourne la cloison pour me rejoindre. Elle me demande de quand date ma passion pour la création murale. Je lui explique ma toute première expérience, sur la Reeperbahn, à Hambourg, lorsque j’avais dix neuf ans, dans le sous-sol d’un salon de thé. << Des cabines avec deux trous dans les murs de séparation. De chaque côté un couple. Juliette m'écoute avec les yeux grands ouverts. Nous avons recommencé à nous vouvoyer. << Que faisiez-vous à Hambourg ? Un Écossais en Allemagne ! >> demande Juliette. J'explique : << Un stage pour mes études. Je suis diplômé de l'École des Beaux-Art de Paris chère madame ! >. Un peu moqueuse, elle fait : << Wouah ! >>

 

    À ma grande surprise Juliette me raconte sa découverte de quelques Gloryhole dans des toilettes publiques. Toutefois ce n’est que la semaine dernière qu’elle a commencé à en comprendre le fonctionnement exacte. Accompagnée d’un vieil ami, marié lui aussi, entrepreneur et vicelard. Elle en garde un souvenir mitigé puisque Jean-Claude, le vieil ami en question, est un éjaculateur précoce. << Cinq minutes et "hop" ! Terminé ! >> s'exclame la jeune femme qui s'empresse de rajouter : << J'aime quand ça dure ! >>. Effrontément, en rangeant mon matériel, je demande : << Vous aimez les pipes ? >>. Juliette ne répond pas. Un long silence. Elle me regarde achever le ponçage des bords du tout nouveau trou. Je ne pense plus à ma question quand elle y répond : << Je réserve à mes très rares partenaires de découvrir par eux-même. J'aime être surprise. J'aime qu'on m'étonne ! >>. J'avale de travers. Je cache mon trouble.

 

Faisant appel à mon courage je propose une prochaine randonnée. Tout aussi effrontément je soumets l’idée de lui faire découvrir les longues joies que je sais offrir à mes partenaires. Juliette a cette réaction typiquement féminine de se détourner en répondant : << On verra ! >>. Par dérision, en mettant mon petit sac sur le dos, une fois le travail terminé, je propose à Juliette de vérifier, si, du côté ou elle se trouve, tout est parfaitement fonctionnel. Je passe derrière la cloison, j’ouvre ma braguette et je glisse mon sexe généreux par l’orifice. << C’est super ! >> fait la jeune femme en éclatant de rire. Je reste ainsi. Une érection commence à gagner ma virilité. Contractant mes muscles fessiers, je fais bouger ma turgescence. << C’est absolument superbe ! >> rajoute Juliette entre deux éclats de rire. Je sais à quoi m'attendre. Toutefois mon acte téméraire et d'une certaine façon "héroïque" restera sans effet. Rien. Juliette vient me rejoindre. Je me branle. Elle reste distante. Silencieuse. << On continue ? >> s'exclame t-elle pour mettre un terme à ma masturbation. Ai-je encore merdé ? Son attitude est souvent plus distante.

 

    Ce n'est pas le genre de femme à sucer un inconnu après quelques heures de balade. Je ne suis donc ni frustré ni dépité. << Vous êtes un heureux "propriétaire" ! "Elle" ferait des envieux ! >> lance Juliette en pointant son index en direction de ma turgescence. Nous rions aux éclats une nouvelle fois. Me voilà rassuré. Je n'ai rien "brisé". Je me réajuste, je range mon sexe, je ferme ma braguette et j'attrape les sangles de mon sac à dos. Nous continuons la tournée d’inspection. Nous arrivons à la station dix huit, le dernier Glory Hole du circuit. J'explique que c’est là, au pied de la paroi, que j’ai découvert ses clefs. La jeune femme me raconte sa seule et unique expérience, à genoux dans l’herbe devant le magnifique trou que j’ai percé là, avec amour, l’été dernier. J’en éprouve soudain une fierté plus grande encore. Elle a pratiqué avec ce vieil ami, Jean-Claude, éjaculateur précoce et peu gâté par la nature. Je montre les coulures de foutre en demandant : << C'est lui ? >>

 

    Elle cache son visage dans ses mains en éclatant de rire. Nous prenons le chemin du retour. En chemin, elle décline mon invitation au restaurant. Je propose d'y passer tout de même pour nous excuser. << C'est la moindre des choses. Je mange très rarement au restaurant, j'ai une diététique extrêmement sévère ! >>précise t-elle. Juliette m’invite à venir manger chez elle le lendemain, dimanche en soirée. << Je serai seule. Mon mari a une relation maladive avec sa mère. Tous les dimanches soir il va manger chez sa maman ! >> rajoute t-elle. Premier dimanche des vacances scolaires de Pâques. J’accepte en proposant de ramener le dessert. Une tarte aux noix de ma création. Excellent cuisinier, je suis également très bon pâtissier. Nous nous séparons devant nos véhicules respectifs. << Trois bises Écossaises et réglementaires ? >> lance t-elle en me tenant les épaules. Nous nous suivons sur la petite route jusqu’à l’arrivée au rond-point.

 

Quel merveilleux après-midi...

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12/01/2024

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