L'ECRIT DE JOIE

L'ECRIT DE JOIE

Gloryhole - Épisode 8

                                             Je suis invité à manger chez Juliette

 

Quand j'arrive chez moi ce samedi soir, je m'empresse d'allumer mon I-phone. Trois appels manqués. Anne-Marie a cherché à me joindre une première fois à seize heures. Une récidive à dix sept heures. Une nouvelle fois à dix huit heures. J'interroge ma messagerie. Deux messages qu'elle m'a laissé. Je me dépêche de répondre à ses inquiétudes. Lorsqu'elle apprend que j'ai passé l'après-midi avec une autre, j'ai droit à quelques remontrances. Même si notre relation n'est qu'une profonde amitié, Anne-Marie est une femme. Donc exclusive en amitié comme en amour. Très rapidement le ton revient à l'humour et à la dérision. Rassurée par mon récit, elle conclue : << Espèce de salaud, tu lui as montré ta queue par le trou. Je veux que tu me gratifies de la même démonstration ! >>. Nous rions aux éclats. Je lui propose de venir manger à la maison de soir. << J'ai prévu un truc avec ma copine du boulot ! >> s'excuse t-elle. Je n'insiste pas.

 

Nous bavardons ainsi une bonne demi heure. Anne-marie me propose une webcam demain matin, dimanche. Nous pourrons discuter de visu. Nous nous souhaitons une bonne soirée. Je me fais à manger. Une salade de concombre. Deux nems avec un riz cantonnais. Je lis, j'écoute un peu de musique. Il est vingt et une heures trente. La sonnerie de mon I-phone. C'est Juliette. Elle m'avoue téléphoner dans le secret de sa salle de bain. La jeune femme revient sur notre randonnée. Un agréable souvenir s'installe déjà dans sa mémoire. << J'exige une récidive ! >> dit-elle à quelques reprises. C'est un peu comme avec Anne-Marie, je ne peux pas dire grand chose dans le flot des paroles. J'adore. Ça m'arrange, j'aime écouter en silence. Quand je peux enfin en placer "une", je parle d'Anne-Marie, de la "scène" qu'elle m'a faite. << Encore une jalouse. Pauvre Julien. Ça en fait deux ! >> s'écrie Juliette. Nous rions aux éclats. Elle conclue : << On se voit demain soir, pour 19 h ? >>. Je confirme. Je serai là sans rien emmener comme convenu. << On parlera "trous" ! >> fait elle encore avant de raccrocher.

 

Mon dimanche commence à neuf heures. Après cette grasse matinée que je m'accorde ce jour là. Je prends mon petit déjeuner en pensant à Juliette. À son invitation. À sa compagnie. À notre randonnée. Me reviennent à l'esprit des mots, des situations. J'essaie de décrypter des phrases prononcées dans des instants précis. Le petit film que je me fais me procure une agréable érection. Érection que je caresse affectueusement sous la table en dégustant ma tartine au miel. Je prends tout mon temps. La petite vaisselle. Je monte me laver les dents. Redescendu au salon, j'allume l'ordinateur. En ces années-là je travaillais encore sur Windows. J'ouvre ma boîte mail. Je découvre mes courriels. J'y réponds lorsque mon I-phone se met à vibrer sur le bureau. Sur l'écran la photo d'Anne-Marie. Ponctuelle, comme à son habitude. Il est dix heures. Nous bavardons un peu avant que nous ne connections nos webcams. Tout fonctionne parfaitement.

 

Sur l'écran, le visage de ma meilleure amie dans son salon. Elle commence par me sourire malicieusement. Elle me raconte le programme de son dimanche. Elle ira manger chez ses parents à midi. L'après-midi sera consacré à sa sœur, à son beau-frère et à leurs deux petites filles. << Il y aura bientôt le "Lapin de Pâques" et les œufs. On va tout préparer. Je te raconterai ! >> m'explique t-elle. Évidemment Anne-Marie revient sur mes deux dernières rencontres. Virginie la jeune cavalière il y a deux semaines. Juliette il y a trois jours. << Tu es quand même un sacré salaud dans ton genre ! Séducteur, va ! >> s'exclame t-elle avant de rire. Je précise : << Mais si tu venais randonner avec moi, tout cela ne se passerait pas ! On ferait des trous ensemble ! >>. Nous rions. << Attends, le jour où tu m'auras dans les pattes, tu n'auras peut-être qu'une envie, c'est d'aller randonner tout seul ! >> fait elle encore. Je propose de songer sérieusement à organiser enfin une virée tous les deux.

 

Nous restons en webcam jusqu'aux environs de onze heures trente. C'est très agréable. Nous nous quittons virtuellement. << Je t'appelle ce soir quand tu seras chez ta Juliette pour foutre un peu la merde ! >> conclue Anne-Marie. Je sais qu'elle en est bien capable. J'éteins l'ordinateur avant de quitter le salon pour la cuisine. Une salade de carottes. Deux tomates farcies à la viande hachée. Accompagnées de pommes de terre rissolées à la poêle. J'aime faire la cuisine. J'y consacre toujours un peu de temps. J'apprécie de présenter dans mon assiette une "œuvre d'art". C'est encore meilleur quand ça flatte le regard. Je mange en organisant mon programme de l'après-midi. J'ai bien envie de faire un de mes circuits "trous". Mais un dimanche aussi ensoleillé verra défiler des foules sur les sentiers. Ce qui serait rédhibitoire si je devais procéder à quelques réparations. Je préfère randonner en semaine. Il est beaucoup plus simple de faire face aux imprévus.

 

Ce sera une promenade à bicyclette. La première de l'année. Je prépare mon petit sac à dos. Je sors ma tenue vélo en lycra. Je vais décrocher ma bicyclette au fond du garage. Je retire la bâche qui la préserve de la poussière. Un coup d'huile sur la chaîne. Le gonflage des pneus. Pour mon VTC j'aime une pression forte. 5,5 bars à l'arrière et à l'avant. Trois cent mètres jusqu'à la rivière. La passerelle. Cinq cent mètres jusqu'à la piste cyclable. Je pédale contre un léger vent de Nord Est. Avec les mouvements, la température est très supportable. Ce sont mes cinquante premiers kilomètres de l'année. J'arrive au port de plaisance. Il y a du monde. Pas une table de libre aux deux terrasses des bars restaurants. Je me console d'un cornet de glace que je déguste assis sur le muret de la jetée. Je suis de retour pour dix huit heures. Pour revenir, ce même vent de Nord Est m'a poussé sur les vingt cinq kilomètres. Plutôt cool. Je prends ma douche sans traîner.

 

Mon Levis 501, mon sweat bleu nuit. Mes baskets. Me voilà en route. La circulation est fluide. Je roule sur les vingt kilomètres avec une certaine impatience. 18 h50. Je me gare sur le petit parking entre le monument et l'entrée du square. Je prends l'itinéraire conseillé par Juliette. Ce qui permet d'arriver par l'arrière des maisons. Sans être aperçu. J’arrive chez Juliette en ce dimanche soir, pour dix neuf heures piles. Juliette m'attend devant le portillon du jardin. Nous nous serrons les mains. La discrétion est de rigueur. Juliette est une femme mariée. Inutile d'attirer des curiosités malsaines. Elle m'invite à la suivre en restant sur les dalles de grès. C'est un beau jardin. << Le potager, c'est mon mari ! >> précise la jeune femme. Juliette est vêtue d'une paire de jeans. D'un sweat shirt bleu. Des baskets. Nous rions en découvrant nos vêtements semblables. En pénétrant dans la maison, immédiatement, mes narines sont flattées par l'odeur.

 

De suaves effluves qui achèvent d'ouvrir mon appétit. Je suis mort de faim. Juliette porte ce soir ses longs cheveux attachés en natte. Je la trouve plus naturelle que hier. La jeune femme a préparé une tourte aux poireaux. Elle m'invite à m'assoir. Je veux toujours me laver les mains avant. << C'est là, au fond du couloir, à droite. À gauche c'est les toilettes ! >> dit elle. Je la laisse. Quand je reviens dans la cuisine tout est prêt. Aussi, assis à la table, lorsque je vois cette magnifique Flamiche Picarde encore fumante, mon appétit est aiguisé jusqu'à la torture. Je dis : < Excusez-moi Juliette, mais je suis habité d'une faim indécente ! >>. Elle se met à rire en coupant deux parts. Elle répond : << J'aime l'indécence ! J'aime beaucoup ! >>. Ces mots provoquent un déclic dans ma psyché. Que dois-je comprendre ? Je cherche désespérément une formule spirituelle pour rebondir sur cette affirmation. Ne trouvant pas, je reste silencieux. Ah, les filles !

 

Nous savourons ce repas en bavardant. La jeune femme parle de son mari. Les quinze années que dure leur mariage. << J'ai une rivale contre laquelle je ne peux rien. Ma belle mère ! >> lance Juliette. Elle m'explique, en riant, la relation de son mari avec sa mère. << Il ne m'a jamais trompé qu'avec elle ! >> dit elle encore alors que nous rions aux éclats de cette plaisanterie. Une fois encore je découvre le talent de dérision de cette nouvelle amie. Je demande : << Et vous ? Quelques aventures ? >>. Elle reste silencieuse un long moment. Nous mangeons de bon appétit. Parfois la jeune femme se lève. Remplir la carafe d'eau. Faire bouillir de l'eau. Moudre du café. Je prends conscience, avec plus de certitude encore, du charme et de la séduction qu'exerce cette grande et belle jeune femme. Pour l’entrée, Juliette a concocté une délicieuse salade d’avocat. La laitue qui accompagne la tourte dorée y apporte cette touche de fraîcheur printanière.

 

<< Nous avons la soirée. Mon mari revient le plus souvent après vingt et une heures. Après avoir bordé sa maman ! >> lance la jeune femme, pleine d'humour. J'essaie de comprendre entre les mots. Quelle doit être mon attitude. Pour un homme, un premier rendez-vous reste toujours une interrogation. Mais le second rendez-vous donne l'impression de passer un examen. J'opte pour la plus totale passivité. Ne rien n'entreprendre. Ne faire aucune allusion au sexe. Attendre et savoir attraper au vol chaque balle lancée dans mon camps. C'est comme un jeu d'échec. Il faut avancer le bon pion. Pour le dessert, Juliette me propose de passer au salon. J'aide la jeune femme à débarrasser. Nous mettons le tout dans le lave vaisselle. << Mon mari ne pose jamais de question. Je ne suis même pas obligée de mentir ! >> précise Juliette en faisant des étirements, debout, penchée en avant pour toucher ses baskets du bout de ses doigts. La sportive.

 

Juliette dirige son agence immobilière. J'apprends qu'elle se retrouve bientôt avec deux semaines de vacances. Elle va passer dix jours, à partir de jeudi, chez ses parents en Vendée. Nous sommes confortablement installés dans des fauteuils. Devant nous, sur la table basse qui nous sépare, nous dégustons des coupes glacées. Nous bavardons. Juliette parle de son travail. De sa collaboratrice, de sa jeune secrétaire et de son agent immobilier qu'elle appelle : << Mon Mario ! >>. J'aimerais bien savoir s'il se passe des trucs avec ce "Mario". Je me garde évidemment de toute question. Fidèle à ma stratégie d'écoute. Très rapidement toutefois la conversation dévie sur notre randonnée de hier. Nous évoquons un peu le parcours jalonné de trous. Mes créations murales. << Je veux absolument découvrir chacune de vos œuvres. Vous allez devoir faire le guide mon cher Julien. Vous m'aurez donc sur le dos pour quelques randonnées à venir ! >> précise t-elle.

 

Je la rassure, ce sera un réel plaisir. Juliette rajoute : << Une randonnée avec moi, une randonnée avec votre Anne-Marie ! >>. Nous en rions quand subitement mon I-phone se met à vibrer dans ma poche. << En parlant de la louve la voilà qui sort du bois ! >> lance la jeune femme. C'est très exactement ça. Le visage d'Anne-Marie s'affiche sur l'écran de mon téléphone. J'hésite. << Décrochez Julien. Je débarrasse pendant ce temps ! >> fait encore Juliette en se levant. Je reste en mode sourdine pour porter l'appareil à mon oreille. J'entends : << Alors, tu es entrain de conclure ou tu as terminé ? >>. Je murmure : << Rien. Tu es entrain de te projeter le mauvais film. On a bien mangé, on a bavardé et là, je m'apprête à repartir ! >>. Anne-Marie me raconte un peu de son après-midi. Je propose de la rappeler une fois rentré. << Non, je serai au lit. Je t'appelle demain. Je suis en vacances tu sais ! >>. Elle raccroche. Juliette reviens s'assoir.

 

<< Elle s'est inquiétée pour rien. Vous l'avez rassurée ? >> me demande t-elle. Nous rions. Nous parlons encore un peu de nos cursus professionnels, sociaux et affectifs. Petit salopiot que je suis, j’essaie à présent d’orienter la conversation sur la sexualité débridée des bonobos, (et de la mienne). Juliette n'est évidemment pas dupe mais il va être vingt et une heures. Elle reste sur le sujet de ses vacances. Je me lève. Elle me raccompagne par le jardin. Il fait nuit. Juste le croissant de lune pour éclairer les trois cent mètres qui me séparent de la voiture. << On reste en contact. Mails ou téléphone. On s'organise la prochaine randonnée pour mon retour ! >> précise t-elle avant de rajouter : << Vous êtes de très agréable compagnie Julien. Merci d'être venu passer la soirée avec moi ! >>. Nous nous saluons. Une fois dans la voiture je tente de décoder les éventuels "messages cryptés" de nos conversations. Je palpe mon érection en conduisant.

 

J'ai bien essayé d'orienter la discussion. Par moments. Tentatives pourtant adroites et subtiles. En pure perte, car Juliette, la quarantaine, n'est pas tombée de la dernière pluie. Évidemment qu'à chaque fois elle m'a vu venir avec mes talons Louis XV, ma chemise à jabots Henri IV et ma perruque Louis XIV. On ne la lui fait sans doute plus ! Ces pensées, ces métaphores burlesques me font rire tout seul. Je suis tout de même comme soulagé. Nous sommes restés dans l’écume des choses. À peine suis-je assis devant une bonne tisane dans mon fauteuil que sonne mon téléphone. À ma grande surprise c'est Juliette. Toujours en formule "secret d'appel". Elle m'appelle depuis sa salle de bain. Son mari est en pyjama devant le film du dimanche soir. Film devant lequel il s'endort souvent avant la fin. Elle précise en soupirant : << La vie de couple quoi ! >>. Amusée autant que moi, elle me donne quelques détails sur le pyjama à rayures de son homme.

 

Juliette me propose une randonnée dès le mardi après-midi de son retour. Elle m'avoue avoir cogité longuement après mon départ. << Si, bien sûr, les conditions météorologiques le permettent ! >> précise t-elle avant de rajouter : << Voilà mon numéro de téléphone ! >>. Je reste un peu décontenancé devant son initiative. Nous bavardons encore un peu. Elle parle à voix basse. Je suis souvent obligé de dresser l'oreille pour ne pas lui faire répéter. C'est un plaisir de l'entendre à nouveau. Je fais part de mon désir de lui faire gouter, à mon tour, de ma cuisine. Aussi, je l’invite à venir manger chez moi, en soirée, à notre retour de cette randonnée. Elle tempère mon enthousiasme en disant : << Je ne m'engage pas. Je suis mariée. Mais j'étudie les possibilités ! >>. Elle accepte toutefois l'idée avec plaisir. Nous nous saluons. Je lui souhaite un excellent séjour Vendéen. << Bonne Anne-Marie ! >> me fait elle. Avant de raccrocher.

 

Rendez-vous est donc fixé pour quatorze heure, mardi, au même endroit que la dernière fois. Dans deux semaines...

 

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19/01/2024

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