Psychothérapeute de luxe
Séance de psychothérapie
J’attends ce lundi depuis celui de la semaine dernière. Sept jours d'une certaine impatience. Mon rendez-vous avec Laure. En son cabinet, pour quatorze heures. Je termine ma vaisselle. C’est légèrement fébrile que je brosse mes dents. Je veux être irréprochable. Pas un poil de nez ne doit dépasser d’une narine. Pas une pilosité superflue sur le bord de l'oreille. Nous partageons un goût commun pour l’élégance. Ce lundi est gris, brumeux et frais. Une température extérieure de seulement 8°. Je me vêts d’une chemise crème, une cravate bleue nuit assortie à mon costume strict. Des bottines noires assorties à mon écharpe et à mon manteau. La météo idéale pour me coiffer de mon “Borsalino“. Je descends pour enfiler mon manteau, mettre mon chapeau. Je prends quelques poses devant le grand miroir de la penderie. J’esquisse un pas de danse dans le hall d’entrée. << Ça va le faire ! >> me dis-je en sortant. Il y a un quinzaine de kilomètres à parcourir jusqu’à la maison médicalisée où exerce ma psychothérapeute. Mes affaires de piscine dans le sac de sport.
En roulant, je me fais quelques films. En y pensant, toute cette semaine, j’ai échafaudé un argumentaire. J’ai même appris par cœur quelques formules. Je suis bien décidé à raconter plein de cochonneries à ma praticienne. Rien que d’y penser une érection déforme déjà mon pantalon. Je suis aussi excité qu’un adolescent revenant de son premier flirt. Je vais confesser quelques déviances. Souligner quelques préférences. Je me dis qu’après tout, il serait inutile de perdre mon temps. Laure est en passe de devenir une amie. Pas encore intime mais l’évolution de la relation en prend le sens. La semaine dernière, j’ai évoqué ma passion des trous dans les cloisons. Il faudrait être la dernière des plus sèches idiotes pour ne pas faire une association d’idée avec ce qui peut se passer là, entre un homme et une femme. Étant hétérosexuel, toute autre approche m’est totalement étrangère. C’est sur ces considérations que j’arrive sur le parking. Les bâtiments forment un “U“. J’ai dix minutes d’avance. La salle d’attente est commune à quatre autres praticiens.
Je m’installe confortablement après avoir déboutonné mon manteau. Pour ne pas être tributaire des magasines “pipoles“ communs à toutes les salles d’attentes, je tire mon petit livre de ma poche. Il n’y a personne. J’entends les bruits d’un trousseau de clefs. Je referme mon minuscule bouquin. À peine l’ai-je remis en poche que la porte s’ouvre. Laure. Elle est radieuse. Ses cheveux châtains, bouclés, entourant son visage angélique, vêtue aujourd’hui d’une jupe ample, noire. Un chemisier de soie rouge aux manches bouffantes. Un dragon doré brodé sur le sein gauche. Des souliers noirs à légers talons. Un superbe tour de cou noir. << Bonjour monsieur. C’est pour le rendez-vous ? >> lance la jeune femme. Je me lève pour la suivre en répondant : << Oui, c’est bien ça ! >>. Je retrouve la décoration cosy de son cabinet. Le bureau, les plantes vertes, les étagères, les toiles abstraites. Le canapé, le fauteuil. << Je vous en prie, installez-vous à votre aise ! >> lance la thérapeute. Je choisi le fauteuil. Il fait face au bureau. Situation stratégique.
Je demande : << Où en étions-nous restés la semaine dernière ? >>. Laure interprète son personnage avec professionnalisme. Comme la fois précédente, elle ne joue pas. C’est une consultation bien réelle. En ce qui me concerne, par contre, je suis surtout là pour réaliser mon “plan“. Vivre un nouveau fantasme. Pour m’amuser. Laure répond : << Vous abordiez le sujet des "trous". Trous que vous creusez dans les cloisons le long de vos parcours de randonnée. Admettez que c'est plutôt singulier ! >>. Un silence. Je décide donc de mettre en application l’argumentaire soigneusement et malicieusement préparé. Je reviens sur ma découverte d’un trou dans les toilettes du lycée. Puis de celui que j’ai creusé dans les toilettes de l’École Nationale des Beaux-Arts où je passais cinq ans d’études. Cette première expérience d’une fellation par cet orifice. Tout en parlant de tout cela avec le plus grand naturel, j’observe, à la dérobée, les genoux de la thérapeute. Sous son bureau. Elle porte des bas couleur chair. Bas ou collants ? Cette fois encore le mystère reste entier. Et le restera…
Le sérieux impassible avec lequel Laure m’écoute me déstabilise quelque peu. Je n’arrive pas à l’embarquer dans ma ruse. J’aborde à présent cette passion naissante pour les trous et pour l’idée de fellation qu’ils induisent. Laure garde les doigts croisés, sous son menton, bien droite sur sa chaise. Je ne décèle aucune émotion dans son regard pénétrant. Ça me gêne délicieusement. Mon érection naissante ne va pas tarder à déformer mon pantalon. Mes bras posés sur les accoudoirs, je reste parfaitement immobile. J’en viens à parler de ma première compagne, notre vie commune durant 10 ans. Sa passion pour la fellation au moins égale à la mienne. Je surprends une lueur dans le regard de Laure. C’est furtif. Fulgurant. À peine perceptible. Lueur pourtant suffisante pour provoquer une érection définitive. Tout en dévoilant certaines déviances que nous avions en commun, je contracte les muscles fessiers de manière rythmée. Ce qui a pour effet d’animer le contenu de ma braguette. C’est à la fois jouissif et stimulant pour continuer mon récit.
Je sais que le but d’une psychothérapie n’est pas d’avoir un conseil, une recommandation ou encore un traitement quelconque. Il est question de parler de soi. De se livrer. Du sujet de son choix. Le thérapeute n’est que l’individu qui reçoit la narration. Le réceptacle en quelque sorte. Il n'est présent que pour écouter. J’abonde donc dans ce sens. Je décris les situations qu’avec Christine, nous aimions créer. << Ce sont toujours les mêmes endroits. Je suis dissimulé. Ma compagne se fait le plus souvent surprendre entrain de pisser. Mon rôle est de sécuriser ses exhibitions ! >>. Laure reste impassible. Il est impossible de ne pas remarquer la danse intime de la bosse dans mon pantalon. Pourtant, mon interlocutrice fait mine de ne pas s’en apercevoir. Je garde le silence afin de ménager mon petit effet. Laure jointe ses mains, ses doigts devant sa bouche. Je continue : << Nous avons reproduit ce scénario de multiples fois. Je n’ai jamais eu à intervenir. À sortir de ma cachette. Il arrivait que Christine finalise en s’offrant une fellation "sauvage". Pour le plus grand plaisir du quidam ! >>
Je me tais. Cette fois je remarque ce bref cillement de paupières. Cet éclat d’intérêt, tout aussi bref, dans ses yeux. Je suis sur la bonne voie. Ma stratégie semble fonctionner. Je reprends ma narration : << De très rares fois elle s’est même fait pénétrer quelques instants par de parfaits inconnus. C’est un truc qui arrivait surtout en été, dans les rochers. À la plage. Mais la préférence de Christine restait la pipe ! >>. J’appuie volontairement sur les deux syllabes de ce dernier mot "pipe". Laure cille des paupières une nouvelle fois. A t-elle du mal à garder son sérieux ? Voilà qu’elle se mordille la lèvre inférieure, qu’elle baisse les yeux, qu’elle saisit son stylo doré. Je garde le silence. Je maîtrise parfaitement la situation. C’est un jeu éloquent et jouissif auquel je me livre là. Tout au fond de moi, je suis convaincu que ce ressenti est partagé. Laure n’est toutefois pas entrée dans mon jeu. Elle y participe de l’extérieur. En simple auditrice. Je peaufine ma narration sans omettre d’y glisser ces petites phrases suggestives préparées depuis plusieurs jours.
Je surprends son regard fixer ma braguette qui bouge comme animée d’une vie qui lui serait propre. Mon ressenti est de l’ordre du vertige. Je reprends : << Il nous arrivait de partir ainsi en "expéditions" deux à trois fois par semaine. Le plus souvent durant ses vacances d’enseignante en primaire. Certes, nous revenions le plus souvent bredouilles mais terriblement excités malgré tout. Quand ma compagne est passée de vie à trépas, ces jeux ont fait partie intégrante de l’immense vide qu’était devenue mon existence ! >>. Laure m’écoute à présent avec un grand intérêt. J’aborde le domaine du sentiment. La plupart des femmes y sont beaucoup plus réceptives. Je continue : << C’est là, il y a huit ans, que m’a repris ma passion pour les trous. Je me suis mis à en faire un peu partout. Comme un appel à l’invisible d’abord, puis comme un appel à une éventualité. Bien évidemment, d’attendre une telle éventualité peu prendre toute une vie. Sinon deux ! >>. Les yeux de Laure restent à présent ostensiblement braqués sur ma braguette. Ça bouge et ça me procure un sentiment mêlé de gêne, de honte et d’excitation.
Un long silence. Elle pose son stylo. Se lève. << Je vous attends lundi prochain, même heure. Nous reprendrons à partir de cette fameuse éventualité ! >> lance la psychothérapeute en contournant le bureau. Je me lève. La braguette complètement déformée par la turgescence qu’elle renferme. Je sors mon portefeuille pour en tirer deux billets de cinquante euros. Laure ne cherche plus à me raisonner. Elle sait que je tiens à payer ma séance. Je les pose sur le bureau en disant : << C’est un plaisir, vous savez madame ! >>. Elle répond : << Un plaisir partagé ! >>. Est-ce un aveux ? Est-ce une formule de politesse ? Je ne connais pas suffisamment cette femme pour apporter une réponse. J’enfile mon manteau. Laure m’accompagne dans le couloir jusqu’à l’escalier. Nos rôles prennent fin en haut des marches. << Je te retrouve à la piscine dans une demi heure. J’ai encore un truc à faire ! >> me confie mon amie. En dévalant l’escalier je m’écrie : << À tout à l’heure madame ! >>. Le stade nautique et ses bâtiments ne sont qu’à quelques kilomètres.
Il n’y a vraiment pas grand monde. Peut-être une dizaine de voitures sur le parking. Mon sac de sport à la main, très élégant dans mes vêtements, je montre ma carte d’abonné à la jeune fille de l’accueil. Elle ne me voit jamais ainsi. Je devine susciter chez elle un autre intérêt. Son sourire est désarmant. Je retrouve ma cabine. Mon maillot de bain. Comme à l’accoutumée, je prends quelques poses de culturiste devant les miroirs. Après avoir fait deux séries rapides de vingt pompes. Le sourire de la dame des cabines. Avec mon mètre quatre vingt huit, j’évolue le plus souvent dans un monde de "petits". C’est quelquefois une impression désagréable. Je n’ai nul besoin de dominer qui que ce soit. Quelques figures sur le plongeoir avant de soigner mon plongeon. Il y a un groupe de lycéens facétieux, deux couples de séniors. Ce qui laisse toute la marge nécessaire pour pratiquer mes dix longueurs. Cette silhouette féminine, là-bas, sous la douche, dans son maillot de bain rouge, coiffée de son bonnet rouge.
Laure. Sous le filet d’eau, elle me cherche du regard. Ça y est, elle m’a vu. Sa démarche nonchalante en s’approchant du bassin. Sa descente le long de l’échelle. Elle s’immerge pour me rejoindre. Nous nageons ensemble. Je dis : << J’avais ma séance de psychothérapie en début d’après-midi. Avec une thérapeute à l’écoute. Je me réjouis d’y retourner lundi prochain ! >>. Laure entre dans mon jeu en parlant d’elle à la troisième personne. Elle fait : << C’est son métier. Elle doit entendre toutes sortes de choses. Parfois c’est récréatif ! >>. Elle cesse de nager, se met sur le dos pour faire la "planche". Je passe sous elle, en plongeant à plusieurs reprises. Elle m’imite. À nouveau nous faisons des largeurs sous l’eau. Nos lunettes permettent une vue parfaite. Nous nous faisons face, touchons nos mains, repartons dans des directions opposées. Remontons à la surface pour reprendre une réserve d’oxygène. Pour nous retrouver dans les profondeurs. Nous ressortons. Laure m’arrive aux épaules. Elle me dit : << Avec ton physique d’acteur ! >>. En touchant mon biceps.
Nous rions en nous installant dans les transats. Laure me raconte son week-end. Elle me propose une randonnée samedi prochain. << Je t’invite jeudi soir. Tu viens manger. Je prépare une surprise ! >> rajoute t-elle. Me reviennent à l’esprit les confessions faites dans son cabinet. Il ne faut pas que j’y pense. Mon maillot de bain rouge ne pourrait en dissimuler les conséquences. Pour éviter cette fatalité, je me lève pour aller chercher deux bouteilles d’eau. Nous passons là un bon moment à regarder les baigneurs. Je demande : << Et ce soir, un bon restaurant, ça te tente ? >>. Laure reste un moment silencieuse, tourne la tête, me fait un beau sourire avant de répondre : << C’est une excellente proposition. Tu sais, j’aime les propositions ! >>. Je demande : << Quelle qu’en soit la nature ? >>. Mon amie répond : << Ça dépend des situations et de la personne qui fait cette proposition ! >>. Est-ce un autre aveux ? Est-ce une invitation à proférer d’autres propositions ? Je préfère en rester à mon interrogation. Ne pas commettre d’impair.
J’ai toujours été fidèle à un principe très simple. Suggérer, ne rien tenter, laisser cogiter puis être attentif à la réceptivité. Répondre intelligemment aux attentes ainsi créées. Laure est une professionnelle des choses de l’esprit. Elle ne devine pas, elle sait par avance. Ce qui rajoute beaucoup de piquant aux fantasmes qu’elle commence à susciter au plus profond de ma psyché. Depuis quelques temps, cela s’affirme graduellement. Nul doute qu’elle en est parfaitement consciente. La "mayonnaise" prend. Nous retournons dans l’eau pour une dizaine de longueurs. Pour quelques largeurs sous-marines. La douche. Il va être dix huit heures. Nous nous retrouvons dans le hall. Laure me retrouve vêtu comme dans son cabinet. << Tu es beau ! >> fait elle. Par contre elle s’est changée. Un pantalon beige, des mocassins beiges, un blouson de cuir crème. Une écharpe beige. Son élégance suscite mon ravissement. Je propose de passer chez elle, d’y laisser sa voiture. De prendre la mienne. Je connais un excellent restaurant à quelques kilomètres.
En kit “mains libres“, tout en roulant, tout en suivant la voiture de Laure, je téléphone au restaurant de l’étang. Rares sont les établissements ouverts le lundi. De la chance. Je réserve une table pour dix neuf heures quinze. Laure gare sa voiture devant son pavillon "tranche napolitaine". Elle me rejoint en courant. S’installe sur le siège passager. Elle évoque ses rendez-vous de la semaine. Son cabinet est réputé et elle reçoit certains jours jusqu’à huit patients. << Quarante cinq minutes à chaque fois. Tu imagines un peu. Du mardi au vendredi ! >> précise t-elle. Je dis : << Et moi qui t'impose une séance une supplémentaire le lundi, jour de ton repos ! >>. C’est la toute première fois que mon amie le fait aussi franchement. Elle pose sa main sur ma cuisse pour répondre : << Ce n’est pas pareil. C’est différent. Et ce que tu racontes est ludique. Optimiste. Constructif d’une certaine façon. Rigolo parfois ! >>. Je garde le silence, secrètement heureux de cette confidence. La nuit est noire. Le brouillard à couper au couteau.
Le restaurant de l’étang porte bien son nom. C’est une grande bâtisse toute en pierres de taille. Au bord d’un étang. Le tout dans un parc à la française. Il n’y a que quelques autos garées sur le parking. La température est de 6°. Laure me prend le bras. Nous montons les marches. Une porte en bois de chêne et aux ferrures imposantes. Une jeune serveuse nous accueille. Notre table nous attend près de l’escalier qui descend aux sous-sols, aux toilettes. Ce sont de petites tables carrées recouvertes de nappes blanches. Des bougies qu’allume la serveuse lorsque nous prenons place. Les flammes dans la grande cheminée. Les murs de pierres. Il y a une ambiance médiévale en ce lieu. Très conviviale. Laure découvre l’endroit pour la première fois. Elle n’est dans la région que depuis quelques mois. De me connaître lui offre l’opportunité de multiples découvertes. Elle m’en est reconnaissante. Nous commandons des grillades. La jeune serveuse apporte une desserte sur roulettes afin de procéder aux grillades sur pierre.
Les délicieuses odeurs des différentes viandes aiguisent nos appétit jusqu’à la torture. Laure ne parle que très rarement du passé. Tout comme moi, seul l’avenir l’intéresse. Comme elle l’affirme : << Le présent est tout juste utilisé qu’il se dilue déjà dans l’inutile ! >>. Nous savourons ces viandes accompagnées de légumes poêlés. Un délice. Les petits pois caramélisés sont tout aussi surprenant que les haricots verts poivrés en sauce. Nous bavardons. Mon amie me pose tout un tas de questions sur mon Écosse natale. J’ai quantité de magnifiques photos dans mon téléphone. Elle les admire, les scrute, demande les détails. Ce n’est que devant les coupes glacées du dessert qu’elle lance : << Tout ce que tu as raconté à ta psychothérapeute reste dans le domaine du secret professionnel. Mais si tu pouvais à présent les raconter à la femme qui est devant toi, ce serait comme un effet de ta bonté ! >>. Je reste interloqué. Nous nous fixons longuement. Ses yeux noisettes, clairs et pétillants, paraissent animés d’une vivacité nouvelle.
Je murmure : << Je ne te l’ai pas encore dit, mais je te trouve belle. Tu es belle ! >>. Laure me sourit. Un air énigmatique se dessine sur ses traits. Peut-être à son insu. J’en frissonne car cela sublime encore davantage la perfection de son visage. Entouré de ses boucles brunes, il reprend de sa préciosité. Je lui en fais part. << Je prends tout cela pour des compliments, je te préviens ! >> fait elle. Laure rajoute : << Mais là, tu esquives. Parle donc de tes déviances à la femme qui est devant toi ! >>. Là, je suis "fais comme un rat". Impossible de divaguer, de glisser, même subrepticement, vers un autre sujet. Je m’en tire par une pirouette lamentable et bien masculine : << Que veux-tu savoir ? Demande et je réponds. Je ne m’adresse pas à la thérapeute mais à Laure ! >>. Bien évidemment, à ce jeu là je suis le grand perdant. Laure enfonce le clou : << Non, non, tu fais comme cet après-midi, devant mon bureau. J’écoute ! >>. Je n’avais pas prévu d’être pris au piège. Je n’ai rien préparé pour ce cas de figure. Je joue pourtant bien aux échecs.
Je me lance : << Et bien, depuis la première fois où c'est arrivé, depuis la fin de mon adolescence, je suis braqué “pipes“ ! >>. Je ne peux pas en dire plus car la gêne m’étreint. M’étouffe. Mais, au fond de moi, je suis soulagé. Voilà. Ça y est, je l’ai dit. La vérité toute nue. J’ai eu le courage. La jeune femme me fixe, me scrute, m’observe comme si j’étais un extraterrestre. Un très long silence. Je n’en mène pas large. Je sens les battements de mon cœur jusque dans mes tempes. Pour tenter de faire diversion, je place mes index aux coins de mes yeux pour les brider à l’asiatique. Aucune réaction. Laure reste à me regarder avec tout le sérieux d’une entomologiste. L’embarras me gagne. Je n’ai plus rien à sortir de ma manche. Au fond de l’abîme le mec ! À ramer dans quelques eaux glauques de ses fantasmes démasqués. Je brise ce silence en disant : << Un lundi, dans ton cabinet, on inverse les rôles ! >>. Après ce silence, devenu véritable torture psychique, elle répond enfin : << C’est une excellente suggestion ! >>. Les cafés. Laure redevient plus loquace.
Il va être vingt et une heures trente. Il n’y a plus que nous. L’addition. Le brouillard s’est encore épaissit. Laure reprend mon bras. Nous restons sur le chemin pour faire le tour de l’étang. Mon amie revient sur son invitation de jeudi soir. << D’inviter quelqu’un me permet de m’abstraire dans la cuisine. J’aime bien cuisiner pour les autres ! >> confie t-elle. Nous revenons à la voiture. C’est la toute première fois, avec tant de sincérité, que la jeune femme passe ses bras autour de mon cou, pour rajouter : << J’ai passé un superbe lundi. Merci de me supporter. Ça me fait du bien ! >>. Je ne saisis pas l’intégralité de ce que je devine un message "codé". Il y a une dizaine de kilomètres. Dans un brouillard dense. Je roule avec une extrême prudence. Laure confie ses impressions quand à la piscine. Nous sommes devant son immeuble. << Jeudi, vingt heures ? >> lance ma passagère avant de sortir. Je réponds : << Jeudi, vingt heures ! >>. Elle se penche pour conclure : << N’emmène rien je prépare le dessert ! >>. Je la regarde entrer par le portillon du jardin. Sa silhouette s'estompe dans la brume...
________________________________________
Tous droits réservés - © - 2025 -
L'utilisation, toute ou partie, d'un texte, (ou photographie), par copié/colé par exemple, sans le consentement de l'auteur, constitue une violation de la propriété intellectuelle. Délit sanctionné par l'Article. L.335-2. du Code pénal.
La divulgation d'informations relatives à la vie privée, ou à l'identité, constitue un délit sanctionné par les articles 706-102-1 (Informatique) et 88-227 du code pénal.
Inscrivez-vous au blog
Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour
Rejoignez les 34 autres membres