L'ECRIT DE JOIE

L'ECRIT DE JOIE

Psychothérapie

Une séance de psychothérapie

 

        Ce lundi matin, après mon entraînement, mon jogging et ma douche, je passe du bon temps dans mon atelier. Le crépitement du bois de hêtre dans la cheminée. Confortablement installé devant mon chevalet, je peins en pensant à Laure. Je viens de prendre conscience que depuis ces quelques semaines où nous nous rencontrons régulièrement, pas une seule fois n’a été abordée la sexualité. Tout au fond de moi, cette petite voix me dit que ce n’est peut-être pas son "truc". Je me fais fort d’aborder la thématique cet après-midi. Après tout, cette séance de psychothérapie mérite d’être relevée de quelques facéties pour qu’elle me soit agréable. Je verrai bien où cela nous conduira. Où cela me mènera. C’est sur ces réflexions que j’arrive à la conclusion de cette matinée. Je nettoie la palette, les pinceaux avant de quitter la grande pièce pour la cuisine. Pendant que réchauffe les nouilles au haché de dinde, je prépare l’assaisonnement de deux belles endives. Je mange de bon appétit en envisageant la stratégie de l’après-midi.

 

       La journée est grise. Une légère brume. L’entreprise paysagiste ne va pas tarder. Les deux employés auront à faire. Un épais tapis de feuilles recouvre la pelouse, le jardin et il en flotte une couche sur le bassin. Le portail est ouvert. À peine ai-je terminé la vaisselle que, par une des deux fenêtres, je vois descendre le camion. Un tracteur sur sa remorque. Je mets l’anorak pour aller saluer Caroline, la chef de chantier. Elle connait son travail. Je n’ai que très peu de directives. Je la laisse en la saluant. Nous nous reverrons demain matin. Ce ne sera pas de trop pour achever l’entretien. La température n’est que de 14°. Une fraîcheur humide. Je me brosse les dents à l’étage en regardant par une des deux fenêtres de la salle de bain. Le jeune employé est déjà à ratisser le gazon. Je me change. Un Levis “brut“, une chemise blanche sous un pull crème au col en “V“. Mes bottines brunes. Mon blouson de cuir brun. Il y a une quinzaine de kilomètres jusqu’à la zone d’activités commerciales. C’est là que Laure exerce. Dans son cabinet, au premier étage d'une maison médicalisée.

 

        Je vais être en avance. Même si je roule doucement, comme j’aime. Les vitesses automatiques de la Mercedes s’occupent de la propulsion. Je n’ai qu’à conduire dans ce tristounet paysage d’automne. Il est treize heures trente quand je gare la voiture sur le parking. Le cabinet de Laure est au-dessus de la pharmacie. C’est ouvert. Bonne idée d’y faire mes petits achats de mauvaise saison. Mes gélules des laboratoires Boiron. Influenzinum, Thymuline et sérum de Yersin. Un tube de Cicaderma et une boîte d’oscillococinum. Me voilà paré. Si je ne monte pas l’escalier en courant, je vais être en retard. Je veux absolument découvrir la salle d’attente et en profiter au mois dix minutes. Excellente mise en condition. Ne pas me tromper. Il y a là un médecin, un dentiste, un gynécologue et un kinésithérapeute. Sur le même palier. La salle d’attente est donc commune. L’horreur. Je déteste la promiscuité. Par chance il n’y a personne. Même si le panonceau précise d’éteindre son téléphone, je consulte allègrement le mien. Vivre dans la transgression permet de développer des facultés interdites aux cons.

 

        Je suis absorbé dans la relecture d’anciens SMS quant la porte s’ouvre. Laure. Comme elle belle en thérapeute. Une jupe brune, légèrement évasée au-dessus des genoux. Des bas légèrement moirés. Ses mocassins à talons très stylés. Noirs. Au dessus crème. Un chemisier carmin aux manches bouffantes. Une écharpe de soie crème. << Bonjour monsieur. Voulez-vous bien me suivre s’il vous plaît ! >> lance la jeune femme comme si j’étais le plus parfait inconnu. C’est insolite. Je me lève, j’éteins mon téléphone en disant tout simplement : << Bonjour ! >>. Nous entrons dans cet endroit que j’imaginais impersonnel et clinique. Il y a un canapé de cuir. Un fauteuil de même cuir. Des étagères. Des plantes vertes entre des livres. Une commode. Un grand miroir. Un porte manteaux. Les murs de couleur ocre pâle. Des tableaux abstraits accrochés. Laure s’installe derrière son bureau. << Vous avez le choix. Si vous préférez le fauteuil ou le canapé ! >> précise t-elle. La jeune femme interprète son rôle à la perfection. J’ai intérêt à jouer parfaitement le mien.

 

        Il y a un moment de silence. Madame Laure me dévisage. Elle finit par rompre ce silence devenu gênant. << Qu’avez-vous à me dire ? Je vous écoute. Lancez-vous. Improvisez. Peu importe le sujet. Tout se précisera très vite et vous trouverez un fil de conversation ! >>. C’est ainsi que débute cette psychothérapie que je croyais comédie. Je me rends rapidement compte que la jeune femme ne joue pas. Elle est là réellement dans l’exercice de sa fonction. Cela me déçoit un peu. J’aurais préféré un entretien plus ludique. Davantage en symbiose avec mes fantasmes. De la fantaisie. Je m’installe confortablement dans le fauteuil. Je fais ce choix délibérément. La vue vers le dessous du bureau va être le spectacle de cette séance. Du moins je l’espère. Moi, je suis venu pour m’amuser. Bien décidé à raconter n’importe quoi avant d’orienter mon monologue sur mes "spécialités". Je suis farouchement décidé à parler de ma passion pour la confection de trous. Je me fie totalement à mon imagination débordante pour aborder le sujet.

 

        Laure garde ses jambes serrées. Je vois ses genoux. Le galbe de ses mollets. Sous ses collants moirés, couleur chair. Sont-ce des collants ou des bas ? Mystère. J’opte pour la seconde probabilité. Les belles bourgeoises sont davantage porte-jarretelles que collants. Me voilà vautré, les bras sur les accoudoirs. Jambes écartées. Viril et masculin. Laure me fixe. Elle reste parfaitement immobile. J’éprouve comme un léger malaise. Je racle ma gorge, je me lance. J’évoque l’école primaire. Des souvenirs précis. Puis le lycée. Le préau. La cour de récréation. La jeune lycéenne qui faisait battre mon cœur depuis l’école maternelle. Je suis adroit dans mon énoncé. J’ai prévu la gradation des faits pour les emmener là où je le souhaite. Je sais que j’ai affaire à une redoutable professionnelle. Il me faut faire appel à toutes mes ruses habituelles en tenant compte de ce facteur. Je commence : << Dans les toilettes du lycée, il y avait un trou dans la cloison qui séparait deux cabinets de toilettes. Cet orifice insolite a marqué mon esprit d’une façon très particulière ! >>

 

        Je me tais. Je veux apprécier l’effet de ma révélation. Aucune expression sur le visage de la thérapeute. Elle garde les yeux baissés. Les mains jointes et posées sur son bureau. Les pouces entre ses seins. Je continue : << Ce trou exerça sur ma psyché un trouble profond. Que pouvait-il bien se passer là ? Pourquoi ? Je tentais d’occulter l’évidence. Refusant de laisser mon esprit s’aventurer dans les méandres troublants que cela suscitait ! >>. Je me tais. Il n’y a strictement aucune expression sur le visage de la dame. Elle ne me regarde plus. Les yeux baissés sur le stylo qu’elle tient à l’horizontal. À l’idée de continuer, une érection me gagne. Une excitation nouvelle m’accable. Agréablement. Pernicieuse et grandissante. Je reprends : << Un après-midi de mai, je n’ai pas résisté. J’ai déboutonné mon pantalon pour passer mon sexe dans cet orifice. Certain d’être seul et qu’il n’y avait personne dans les toilettes. Je suis resté ainsi un long moment, pénétré de pulsions inconnues mais délicieuses ! >>

 

        Le visage toujours aussi impassible de madame Laure me chagrine un peu. J’aimerais que les cochonneries que je lui raconte l’émeuvent. Il n’en est rien. Je continue : << J’ai pris l’habitude de le faire tous les après-midi. Prétextant un besoin urgent pendant le cours pour descendre aux toilettes. Puis également le matin. Au bout de quelques semaines, ce trou est devenu la cause d’un fantasme récurrent. Au point de penser à creuser un tel trou quelque part près de la maison familiale. Ce trou a été fermé ! >>. Je me tais. J’ai beau scruter. Aucune émotivité visible sur le visage de sphinx de ma thérapeute. Je fixe ses genoux. Peut-être va t-elle finir par les écarter légèrement. Rien. Cette femme est une statue de marbre. Je reprends : << Quelques années plus tard, à l’université, j’ai récidivé. Mais cette fois j’étais l’auteur de ce trou. Le créateur. Il y avait d’anciennes toilettes qui allaient êtres détruites. Des toilettes modernes, propres et aseptisées pour les remplacer. C’est dans une des cloisons, entre deux des anciens cabinets, que je perçais mon premier trou ! >>

 

        Devant de tels aveux je veux espérer qu’enfin il y ait au moins un clignement de paupières. Rien. Je désespère. Je reste silencieux. Laure garde les yeux baissés. Je suis convaincu qu’elle a deviné mon "approche". Ce sont pourtant d’authentiques confessions. Elle devrait montrer un peu d’empathie. Que nenni. La déception risque de devenir frustration si je ne me montre pas plus habile dans mon narratif. J’espère que la suite saura susciter un regard et une lueur dans les yeux noisettes fixant le stylo. Je continue : << Je reprenais mes petites habitudes dans les anciennes toilettes de l’université. Je garde le souvenir de cette extraordinaire aventure. Un après-midi, à quinze heures, j’étais dans un de ces cabinets de toilettes. J’avais pris l’habitude de me masturber avant de glisser mon érection dans l’ouverture. Je m’apprêtais à le faire. Un bruit de pas. Personne ne vient jamais ici. Aucun étudiant. Aucun étudiant certes, mais une étudiante si ! Je la regarde faire sa petite affaire. Elle remarque le trou ! >>. J'arrête ma narration.

 

        Je reste en apnée. Je veux ménager mon petit effet. Je viens de deviner l’esquisse d’un mouvement des lèvres de Laure. Enfin. Mes cochonneries auraient-elles un retentissement dans l’imaginaire de ma thérapeute ? Je continue : << J’ai déjà vu cette jeune fille à quelques reprises. Dans les couloirs, dans les escaliers ou encore dans la salle de documentation. Brune. Réservée, discrète et sans doute timide. Elle vient d’apercevoir cet œil qui l’observe par le trou. Je me recule immédiatement. Je retiens mon souffle. J’entends la chasse d’eau, des bruits de pas précipités. Puis plus rien ! >>. Je me tais. Toujours aucune expression notoire. Ça devient frustrant. Je reprends : << Je reviens tous les jours. Le lundi de la semaine suivante, je suis à nouveau surpris par le même bruit de pas. Quelqu’un dans le cabinet voisin. Je regarde furtivement. C’est l’étudiante. Je me redresse pour reprendre ma masturbation. En ayant l’intime conviction d’être vu, d’être regardé. Je n’ai jamais connu un tel sentiment d’extase ! >>

 

       Cette fois, je n’ai pas rêvé. Une esquisse de sourire, un bref instant. Laure lève les yeux pour m’observer. Va t-elle apercevoir l’énorme bosse qui déforme ma braguette, légèrement sur la gauche ? Avec les contractions des muscles fessiers, je la fais bouger. Nul doute, ma thérapeute sait que je l’oriente vers un terrain prévu. Je manque de subtilité. Je fais pourtant de mon mieux. Je m’attends à ce qu’elle mette un terme à la séance. Il n’en est rien. Laure baisse les yeux. Son stylo. Certainement un "Mont Blanc". Je veux reprendre quand je devine un léger rictus de ses lèvres. Est-elle entrée dans mon jeu ou est-elle impatiente de connaître la suite ? Les deux cas de figure me paraissent identiques. Mais je ne suis pas psychothérapeute. Je reprends : << Je n’entends plus aucun bruit. Depuis les années lycée, ce fantasme n’a fait que s’incruster en moi. Le désir de le réaliser est devenu, cet après-midi là, irrépressible ! Je me tourne. Deux doigts disparaissent soudainement de l’orifice. Je l’interprète comme un “signal“ ! >>

 

        Cette fois je garde le silence. Laure relève les yeux. Son air sérieux devient sévère. Va t-elle mettre fin à mes diatribes ? Va t-elle vouloir me faire cesser ce monologue tendancieux et qu’elle devine préparé de toutes pièces ? Elle baisse les yeux. Me signifiant que je peux continuer. Ce que je fais dans une jouissance intellectuelle rare. Je reprends le fil de mon récit : << J’hésite un instant. Puis, en retenant ma respiration, je passe mon érection dans l’orifice. Je suis mort de peur. Et si j’avais affaire à une prédatrice ? À une sadique ? À une féministe ? Ou encore à une dingue ? Terrifiant ! Mes mains à plat sur la cloison, mon bassin collé tout contre. Je suis en sueur ! >>. Je m’arrête de parler. C’est volontaire. Abrupt. À ce degré de suspens, tout être normalement constitué et sain d’esprit voudrait connaître la suite. Ce silence soudain et vertical fait partie de ma stratégie. C’est oublier que la professionnelle qui m’écoute n’est pas dupe. Surtout qu’elle lève les yeux pour fixer ma braguette animée d’un léger et discret mouvement. Je suis extrêmement gêné.

 

       Gêné et honteux. Mais cela fait partie des excitations toutes personnelles que j’apprécie par dessus tout. C’est un long moment. Juste le bruit lointain des voitures sur le parking. Laure m’adresse enfin la parole : << Vous désirez continuer ou vous préférez remettre à la prochaine séance ? >>. Je reste pantois. Y aurait-il donc possibilité d’une récidive ? Cette question est également une réponse. Je reste à y réfléchir. Rien dans l’attitude de la jeune femme ne demande réponse. Laure m’adresse un sourire avant de reprendre son sérieux. Est-ce pour me faire comprendre que je peux continuer ? Je tente. Je reprends mon histoire : << C’est la première fois que je réalisais ce fantasme. C’était un véritable choc. Aussi pertinent que ma découverte durant les années lycée. En ayant l’intime certitude que cette expérience était partagée par ma complice, de l’autre côté de la cloison. Je ne me souviens pas d’avoir éjaculé aussi rapidement. Aucun contrôle possible. Moi qui croyais déjà, à vingt ans, pouvoir maîtriser mes élans ! >>

 

        Laure lève les yeux. Cette fois j’y découvre une expression. Malicieuse peut-être. Amusée certainement. Je continue : << Nous avons récidivé trois fois avant les vacances. Sylviane m’a avoué partager le même fantasme après avoir découvert ce trou l’hiver dernier. Si j’avais su ! Je serais venu ici bien plus tôt ! Nous avons flirté un peu. Sylviane avait un petit copain. Nous ne nous sommes jamais revu. Depuis, il m’arrive de commémorer ces années d’université en faisant des trous de ci, de là. Peut-être dans le secret espoir d’y retrouver une Sylviane ! >>. Je me tais définitivement. Laure se lève. Il y a une machine à café. << Ça vous tente ? >> me demande t-elle. J’accepte volontiers. Fin de la séance. Elle vient s’installer sur le canapé à ma droite. Je n’ose pas engager une conversation quelconque. Je ressens une légère honte. Laure brise la glace : << Tu vas en vacances en Écosse à Noël ? Édimbourg ? >>

 

       Je confirme en avouant me réjouir comme un gamin. Je réponds : << Le marché de Noël d’Édimbourg est une merveille. Il y a chaque année un thème différent. Toujours axé sur le féérique, les légendes où encore les comtes populaires ! >>. La jeune femme revient sur son désir de "faire l’Écosse" avant ses quarante ans. << Mais à la belle saison. Je suis allée voir sur Google, il y a de superbes randonnées sur les sentiers John Muir. J’ai quelques penchants pour la varappe. Je vais m’organiser un séjour ! >>. Je précise : << Réserve au moins trois semaines, en essayant d’être mobile. Il vaut mieux prévoir dès février pour le mois de juillet. Mais la meilleure saison est à cheval sur mai et juin. Sinon les étés indiens de septembre sont des enchantements ! >>. Laure m’écoute avec autant d’attention que lors de la séance. Je propose de faire quelques itinéraires qu’elle pourra étudier. << Génial ! Tu ferais ça ? C’est gentil ! >> s’exclame t-elle. Je réponds : << C’est mon pays d’origine tu sais, alors d’en parler ne m’ennuie jamais ! >>

 

        Nous bavardons. Il va être seize heures trente. Je propose : << Ce soir, un bon restau. Je passe te prendre chez toi. On va au “Bol d’Or“, c’est ouvert même les lundis. Ça te dit ? >>. Laure réfléchit un instant. Elle vide sa seconde tasse de café avant de lancer : << D’accord. Mais pas avant dix neuf heures trente. Je vais encore aller en ville d’abord ! >>. Je me lève. Je récupère mon blouson que j’enfile. Je sors mon portefeuille. << Tu fais quoi là ? >> s’écrie t-elle quand je pose deux billets de cinquante euros sur le bureau. Je réponds : << Ben je paie. Je suis un patient comme un autre. Et je me permets d’insister. Faisons les choses comme il se doit ! >>. Elle ne dit rien. Laure me raccompagne jusqu’à l’escalier. Nous nous serrons la main. Je dis : << Merci. Grâce à cette première séance je vais déjà beaucoup mieux ! >>. Nous éclatons de rire en même temps. Ce qui résonne dans la cage d’escalier, jusqu’en bas. Je ne démarre pas de suite. Je veux me refaire le film avant de m’en aller. Je me dis : << Bravo ! Au-delà de tes fantasmes mon vieux ! >>

 

        J’arrive devant la "tranche napolitaine", c’est ainsi que la jeune femme appelle sa maison. Un peu avant dix neuf heures trente. Je reste dans la voiture. La silhouette élégante de Laure surgit de la brume devant le portillon de son jardin. Elle s’installe sur le siège passager. << Il n’y avait quasiment personne dans les rues en ville ! >> m’apprend t-elle. Je démarre. J’ai réservé une table au "Bol d’Or". Bien inutilement car les clients ne se bousculent pas les lundis soirs. C’est le seul restaurant du bourg. Un endroit charmant, plutôt intime et simple. Notre choix se porte sur des tomates farcies accompagnées de petites patates aux lardons. Une crudité aux fromages. Nous partageons là un moment de pur plaisir. Pas une seule allusion à mes confidences de l’après-midi. Ma thérapeute est d’un professionnalisme exemplaire. Par contre, nous revenons sur notre rencontre à la piscine. << J’y retourne lundi prochain après notre séance ! >> précise t-elle. Je dis : << Tu risques fort de m’y croiser ! >>. Nous en rions de bon cœur.

 

        Le dessert, de gigantesques coupes glacées, vient parfaire ce délicieux repas. Sur la vingtaine de tables, seules trois sont occupées. << J’adore cet endroit. Encore une découverte grâce à toi ! >> dit la jeune femme. Nous revenons sur sa passion de la montagne. J’apprends que lorsqu’elle était étudiante Laure pratiquait l’escalade. Elle raconte : << J’ai eu la peur de ma vie, accrochée à une paroi. En rappel. Un piton qui a dévissé. Il s’en est fallu de très peu. J’ai pu me raccrocher juste à temps. C’était six cent mètres de chute et sans parachute ! Depuis, je pratique la natation, c'est moins haut ! >>. Nous rions. Les cafés. Il va être vingt et une heures. << On est trop bien ici. Regarde, il y a une cheminée comme chez toi. J’espère qu’ils vont l’allumer un de ces soirs ! >> lance ma thérapeute privée. Nous traînons véritablement à table. Échangeant des souvenirs marquants. C’est durant ces partages que Laure demande : << Tous les trous que j’ai vu un peu partout hier, c’était toi ? >>. Je suis un peu gêné aux entournures. Coincé. Fait comme un rat !

 

Un silence. Je fini par répondre d’un << Oui ! >> à peine audible. Elle n’en dit pas davantage, s’amusant de mon embarras. Posant sa main sur mon bras, elle murmure : << Un culturiste, auteur de récits érotiques sur son blog, musicien, peintre d’Art et "menuisier" à ses heures perdues ! Quoi de plus intrigants pour une thérapeute ! >>. Je demande : << Seulement pour une thérapeute ? >>. Nous rigolons comme des bossus. Le rire est communicatif. Les clients d’une des tables occupées, se mettent à rire eux aussi. Nous en avons les larmes aux yeux. Dans un des mouvements de son poignet, je découvre les pierres scintillantes dans l’écran de sa montre. Elle me la fait voir en disant : << C’est une Chopard ! Ce sont des émeraudes. Il y a un verre double ! >>. Je saisis son poignet pour mieux distinguer. Les émeraudes sont assorties à son écharpe vert d’eau. Elles ne sont pas en contact avec les aiguilles mais en donnent l’illusion. L’addition. La brume s’est encore densifiée. Il n’y a pas un kilomètre jusqu’à la "tranche napolitaine". << Merci pour les surprises de cette journée ! >> fait elle.

 

        Ma passagère rajoute : << Non seulement je ne m’ennuie jamais avec toi mais je prends beaucoup de plaisir ! >> dit elle. C’est la toute première fois qu’elle dépose une bise sur ma joue. En répétant : << Merci ! >>. Elle ouvre la portière, rajoute : << Je t’appelle cette semaine ! >>. Elle referme pour se sauver rapidement, sa silhouette s’évanouissant dans la brume. Je démarre. Il y a cet étrange sentiment qui m’habite sur la route du retour. Finalement, une psychothérapie bien menée, et par une professionnelle, ça soulage de bien des ressentis tout en créant des émotions nouvelles. Je retrouve la douceur de mes draps de lin pour m’y endormir dans le sommeil du juste...

 

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24/01/2025

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